En quatre mois : explosion du nombre de burn-out des salariés
Le burn-out des salariés est en nette progression. Comment expliquer ce phénomène de l'épuisement au travail ? 2,5 millions de salariés sont concernés. Le décryptage de la psychanalyste Claude Halmos.
Selon le baromètre OpinionWay, la détresse psychologique des salariés semble s’être améliorée depuis qu’ils ont pu regagner leurs lieux de travail. Mais le nombre de burn-out, en revanche, continue à progresser : 25% de plus, depuis le mois de mai, et 2,5 millions de salariés qui sont actuellement frappés.
franceinfo : Claude Halmos ces chiffres sont impressionnants, comment les expliquer ?
Claude Halmos : Ils sont certainement liés d’une part à l’extrême violence psychologique qu’a fait subir à tous les français, la pandémie ; d’autre part aux difficultés psychologiques, très importantes, que peut entrainer le télé travail. Auxquelles s’ajoute le fait que ces deux dangers ayant été très largement sous-estimés, on n’a pas aidé les gens à s’en protéger.
Nous sommes passés, du jour au lendemain, avec le Covid, d’un monde capable d’affronter les maladies, à un autre où nous étions impuissants, et sans autre recours que de nous enfermer dans nos maisons. Cela a été, pour tout le monde, très perturbant. D’autant que nous avons dû supporter, outre la violence de l’enfermement, une présence permanente de la mort. Sous la forme d’une peur, pour nous-mêmes, ou nos proches, mais aussi d’annonces sans fin du nombre des morts. Comme lors d’une guerre…
Vous parliez des difficultés du télétravail ?
Au niveau du travail, beaucoup de gens ont vécu en plus, la peur d’une autre mort : celle de leur entreprise, ou de leur emploi. Ceux qui ne l’ont pas perdu, ont vécu le télétravail qui peut être très déstabilisant. Notre vie est, comme notre identité, composée de deux parties : l’une professionnelle, l’autre privée, et notre équilibre nécessite qu’elles soient clairement identifiées. Travailler dans un lieu différent de notre domicile, nous y aide. D’autant que nous y bénéficions d’interactions sociales, du regard des collègues, qui donne sens au travail, d’une progression possible.
En télétravail, même dans de bonnes conditions, nous en sommes privés. Beaucoup de gens ont donc craqué, au point de ne plus pouvoir travailler. D’où le diagnostic de burn-out. Diagnostic toujours un peu flou parce que, même si le problème est déclenché par le travail, il fait souvent résonner des blessures personnelles, très profondes, et très enfouies.
Qu’est-ce qui peut aider un salarié en burn-out ?
Il est important d’abord qu’il prenne conscience du poids de ce qu’il a subi, pour qu’il ne s’imagine pas qu’il a craqué à cause de fragilités psychologiques particulières. Ce qui serait dévalorisant pour lui, et de plus, faux. La colonne vertébrale la plus solide ne peut pas pour autant tout porter ; le psychisme, non plus. Ensuite les thérapies sont très utiles, à condition qu’elles prennent en compte le poids des réalités subies.
Mais l’appui du collectif est également essentiel. Une cérémonie nationale d’hommage aux morts du covid doit être, prochainement, organisée. Il serait important aussi que, dans les entreprises, on organise des temps d’échange pour parler, ensemble, de ce que l’on a vécu. Ce serait un vrai travail de prévention.
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