C'est mon affaire. Quels sont mes droits en cas d'accord de performance collective ?
Valeo, L'Équipe, Ryanair, Derichebourg... Il va falloir se faire à ce nouveau dispositif : les accords de performance collective sont de plus en plus fréquents. Quels sont mes droits si cela se produit dans mon entreprise ?
Les accords de performance collective sont très appréciés par les employeurs, beaucoup moins par les syndicats... Ils ont été créés il y a trois ans par les ordonnances Pénicaud. Sabrina Kemel est avocate, spécialiste en droit du travail.
franceinfo : première question, parce que c'est ce qui choque : est-il vrai que si, en tant que salarié, je refuse de signer cet accord, mon patron a le droit de me licencier ?
Sabrina Kemel : c’est vrai, il a la possibilité de vous licencier dans les deux mois qui suivent le refus de votre adhésion à l’accord de performance collective.
Du coup, on est licencié pour quel motif ?
Pour un motif personnel, et non pour un motif économique, parce que l’accord de performance collective est complètement décorrélé des difficultés économiques. Vous êtes licencié pour un motif personnel, pour cause réelle et sérieuse, donc vous percevez votre indemnité de licenciement, vous avez droit à votre préavis et vous pouvez-vous inscrire au chômage.
On me consulte donc individuellement ?
Vous allez être informé des modalités de cet accord, de ce qu’il change dans votre contrat de travail, puisqu’il se substitue à votre contrat de travail, et vous acceptez ou vous n’acceptez pas.
Qu’est-ce qu’il peut modifier ?
Le temps de travail, le salaire, et tout ce qui touche à la mobilité. C’est-à-dire que par exemple, on pourrait avoir un accord qui va augmenter votre durée du travail, sans forcément augmenter votre rémunération, ou un accord qui va toucher à votre rémunération à la baisse.
On peut baisser mon salaire et je n’ai rien à dire ?
Exactement, et c’est là où entrent en jeu les syndicats qui sont censés exprimer la voix des salariés et défendre leurs intérêts.
Quelles autres éléments peut modifier cet accord ?
La mobilité des salariés. Vous imposer une mobilité de plusieurs centaines de kilomètres alors qu’en principe on ne pouvait pas bouger votre lieu de travail à plus de 200 km de votre domicile. Les primes, les primes de 13e mois, d’autres primes. On peut toucher au repos.
Les vacances ?
Les vacances, c’est plus compliqué parce qu’on a droit à nos cinq semaines de congés payés, donc c’est un terrain qui est un peu plus compliqué, mais sur tout le reste, on peut.
On reste dans le domaine du code du travail ? On ne peut pas descendre en dessous des garanties données par le Code du travail ?
Non, on ne peut pas descendre en dessous des garanties du Code du travail mais quand on a un accord de performance collective qui va diminuer la rémunération d'un salarié, ça touche quand même au noyau dur de son contrat de travail. Donc on ne descend pas en dessous du SMIC, mais quand on perd 100 à 200 euros par mois, c’est dur.
C’est un accord qui est forcément sur un temps défini ? C’est un effort ponctuel qu’on demande aux salariés ?
Il peut ne pas y avoir de date limite, mais si l’accord ne précise rien, c’est une durée déterminée de cinq ans.
Est-ce qu’il y a des engagements en échange de la part du salarié ?
Pas forcément, mais si vous voulez que votre accord soit signé, il semble important que l’entreprise s’engage. Donc, les accords récents maintiennent par exemple l’emploi. Mais ce n’est pas obligatoire.
Comment est-ce qu’il est adopté, est-ce que j’ai mon mot à dire, est-ce que les salariés peuvent être consultés par référendum ?
Oui, dans les petites entreprises où il n’y a pas de CSE. Sinon ça se joue au niveau des syndicats.
Vous leur voyez un bel avenir à ces accords ?
Oui, parce que c’est un outil fort de flexibilité et ça permet vraiment de préserver certaines entreprises.
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