Les entreprises de plus en plus sensibilisées pour repérer les situations d'illettrisme
Les entreprises prennent-elles suffisamment en compte l'illettrisme parmi leurs salariés? C'est la question que se pose (et que leur pose) l'ANLCI (Agence nationale de lutte contre l'illettrisme) par le biais d'un test, qu'évoque ici Sarah Lemoine.
franceinfo : comment se présente la démarche de cette agence ?
Sarah Lemoine : Avez-vous une culture de l'écrit dans votre entreprise ? Y a-t-il des salariés qui refusent d'aller en formation ? D'autres qui prétextent un oubli de lunette quand il faut lire un document ? Ou ceux qui demandent à travailler la nuit ? Des clients insatisfaits parce que les consignes n'ont pas été respectées ? Voilà quelques-unes des questions d'Ev@gill, ce test gratuit mis au point fin 2020 pour sensibiliser les entreprises à l'illettrisme. D'après les derniers chiffres officiels, 1,3 million de travailleurs dans le privé et dans le public souffrent en silence de ce handicap qui n'est d'ailleurs pas reconnu comme tel. Tous les secteurs professionnels sont concernés, même si l’agriculture, l'agroalimentaire et le BTP sont surreprésentés.
Être en situation d'illettrisme, cela signifie quoi ?
C'est quand on a été à l'école, en France, mais qu'on ne maîtrise pas suffisamment la lecture, l'écriture, le calcul, les repères dans l'espace et dans le temps pour être autonome : ne pas pouvoir écrire un chèque, ne pas pouvoir lire une notice ou une histoire à ses enfants, ne pas comprendre un discours élaboré ou un jargon professionnel. Ceux qui en souffrent mettent en place des stratégies d'évitement et de contournement pour s'en sortir. Au travail, c'est utiliser des codes couleurs, photographier un mot dans sa tête, demander à un collègue de remplir sa demande de congés.
Sauf qu'avec l'explosion du numérique et de l'intranet, les choses deviennent de plus en plus compliquées. On est plus souvent malade, plus souvent victime d'accident du travail. Et on cache bien fort tout cela, car c'est impossible à révéler. C'est tellement difficile à dire que seules 1% des personnes en situation d'illettrisme font la démarche de réapprendre selon la chercheuse Anne Vinérier.
Est-ce que les entreprises passent à l'action ?
Cela va dans le bon sens, d'après l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme. Une expérimentation menée avec onze entreprises, dont Disneyland et Sodexo, a déjà permis d'aider 500 salariés par des formations sur mesure, qui répondent aux besoins du travailleur et de l'entreprise. "Une quinzaine de grands groupes sont en train de travailler sur un plan d'action" indique la cheffe de projets Lamia Allal. Cela bouge aussi dans les structures d'insertion par l'activité. Et l'an prochain, un effort particulier sera déployé en direction des apprentis.
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