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C'était comment ? Les poètes nous sauveront

Le marché de la poésie se tient à Paris. Auteurs, éditeurs, lecteurs, se retrouvent, jusqu’à dimanche, place Saint-Sulpice. Nathalie Bourrus y était.

Article rédigé par franceinfo, Nathalie Bourrus
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Une fresque de Miss-Tic saisie à Paris, en 2015. (DENIS BOCQUET CC BY 2.0 VIA FLICKR)

C’était… de la politique… enfin. Mais de la vraie, pas des bagarres de "cojones". Car la poésie, on va le rappeler, est celle qui dit, au public, en public. Le poète est celui qui cherche le mot, quitte à s’en rendre malade.

"On est capable d’organiser, des débats, sur UN terme", me dit une éditrice.

Assise sur un banc de cette place, en plein soleil,  elle déguste sa salade. Tout autour, ça respire la tranquillité.

"C’est un leurre", ajoute-t-elle

Moi : "Comment ça, un leurre ?"

Elle : "Ce calme, c’est un leurre… tout le monde pense que la poésie est un vieux machin un peu mort."

Moi (réalisant que je suis entourée de sexagénaires minimum) : "Ben oui, un peu."

Elle : "Il n’y rien de plus cru, voire cruel, que le poète. Rien de plus politique. Le poète doit dire les choses, il doit s’acharner."

Elle pose sa salade. "Le poète a une cible, et il va s’organiser dans sa tête, pour arriver à ses fins."

Moi : "Mais ce n’est pas la guerre, la poésie."

Elle : "Mais non, vous êtes naïve mademoiselle, la guerre c’est autre chose" (tiens ça faisait longtemps qu’on ne m’avait pas appelle mademoiselle.. sympathique, ou ridicule, au choix).

Elle poursuit : "Ecoutez, lisez Bruno Durocher par exemple ! Si ça, ce n’est pas un engagement politique !"

Bruno Durocher. Je cours au stand des éditions Caractères. Et là, le poète polonais de la Shoah, qui a tant voyagé et tant édité, est partout.

Et je lis : "Hommes de toutes les langues et de toutes les couleurs, je me déclare votre frère."

Puis : "J’ai marché j’ai voyagé j’ai traversé les paysages les couleurs et les horizons. Une multitude d’images est entrée dans mes yeux. Elles ont attaqué ma sensibilité. Mais n’ont pas entamé mon unité."

Le sens de nos vies....

Le soleil est toujours là. Je continue ma route vers la poésie. Des éditeurs discutent avec des auteurs. Et c’est vrai, ça bataille sec.

Je tends l’oreille. Objet du débat : le sens de nos vies. Oh là là… Il y en a pour des jours, et des tonnes de nuits.

"Ah ! mais nous, on a l’habitude, c’est toute notre vie, le débat ! C’est de la politique pure, me dit l’un d’eux. Le poète doit DIRE, c’est sa vocation, son obligation. Son affaire, c’est l’apostrophe, c’est énoncer les choses… vous voyez ?"

Moi : "Oui, oui, je vois, on voit tous là je crois."

Et je vois tellement bien, que je ne peux m’empêcher de vous rappeler que c’est l'un d'entre vous, ici a franceinfo qui a qualifié ma chronique "d’investigation poétique"… Ersin Leibowitch, precisemment. Quel hommage à la poésie, dont j’ai toujours aimé me nourrir. Je fais donc de la politique, sans "cojones", c’est bon à savoir.

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