A Genève, là où l'aventure Croix-Rouge a commencé
A
l'horizon, on voit les Alpes. A quelques pas, il y a le lac Léman, et tout
autour, sont implantées des organisations internationales : le Palais des
Nations, siège européen de l'ONU, le Conseil des Droits de l'Homme, le Haut
Commissariat aux réfugiés, l'Organisation Mondiale de la Santé...
"Le
bâtiment dans lequel nous nous trouvons aujourd'hui est un bâtiment historique.
Nous sommes là depuis la fin de la Seconde guerre mondial e", explique
Jean-Yves Clemenzo, l'un des porte-parole du CICR. Ce bâtiment que les
riverains appellent tous le "Carlton" était au départ un grand hôtel
avant de devenir un orphelinat en 1940, et donc ensuite le siège de
l'organisation.
L'aventure
Croix-Rouge, elle, remonte à encore plus longtemps : la bataille de Solférino
en juin 1859. Henri Dunant est un homme d'affaires suisse qui commerce avec
l'Afrique du Nord. Il a besoin de rencontrer l'Empereur français pour ses
affaires. Mais Napoléon III n'est pas à Paris. Il est à la tête de son armée en
Italie. Alors Henri Dunant part en Italie. Et c'est ainsi, presque par hasard, que le genevois se retrouve spectateur de la terrible bataille de Solférino qui fait près de 40.000 morts. Il découvre les champs de bataille jonchés de
combattants agonisants. Spontanément, il organise leur prise en chargé, aidé par
les riverains - les femmes surtout.
Souvenirs
de Solférino
De
retour en Suisse, il écrit un petit livre fondateur, Souvenirs de Solférino .
C'est sur la base de cet ouvrage que
l'organisation est alors fondée, avec pour principal objectif de venir
en aide à toutes les victimes de conflits, civiles comme militaires, quel que
soit leur camp.
Depuis, la
Croix-Rouge a reçu le Prix Nobel de la Paix à quatre reprises au cours du vingtième siècle. C'était en 1901, 1917, 1944 et
1963.
Si
aujourd'hui, les 18 membres de l'assemblée dirigeante à Genève sont encore tous
de nationalité suisse, le mouvement, lui, s'est internationalisé. Il existe
dans le monde 186 sociétés Croix-Rouge ou Croissant rouge. Au siège du CICR,
les 800 salariés jonglent du français à l'anglais en permanence. Tous parlent
au moins trois langues. C'est depuis les couloirs de ce bâtiment genevois que
sont dirigés 13.000 salariés et volontaires, en poste sur tous les terrains de
conflit. Le budget annuel du CICR est d'un milliard d'euros. "Je suis
en relation permanente avec 19 pays depuis ce couloir ", explique
Yasmine Praz-Dessimoz, responsable des opérations pour l'Afrique de l'Ouest.
"Dans le couloir d'en face il y a l'Asie et l'Océanie, au dessus, les
Amériques.... Depuis ces quelques couloirs, on est en réseau avec toute la
planète " s'amuse-t-elle.
Yasmine
Praz-Dessimoz dirige notamment les opérations du CICR au Mali. Cela lui a valu
de descendre plusieurs fois cette année au sous-sol du bâtiment où se gèrent
les urgences. A l'entrée, il y a un voyant rouge pour indiquer que la grande
salle est occupée. Ce qui se dit ici est confidentiel. "Nous sommes
dans la red room, la salle rouge ", indique Yasmine Praz-Dessimoz.
" Toutes ces cartes que vous voyez sont mises à jour en permanence pour
coller au mieux aux réalités sur place. Ici, nous avons les horloges du monde
entier, et ce tableau blanc est celui sur lequel nous indiquons le déploiement
de nos équipes sur les zones sensibles avec un code couleur selon le niveau
d'engagement de nos hommes et femmes ", ajoute la directrice. En ce moment, ce sont ses confrères
responsables du monde arabe qui occupent le plus cette cellule de crise. Le 13
octobre, sept membres de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge ont été enlevés
en Syrie. Quatre d'entre eux ont été libérés, mais c'est toujours l'inquiétude
pour les trois autres.
Un
système de communication sécurisé
Hors
des périodes de crise, le CICR soigne également la confidentialité de ses
communications.
"Pour
la plupart de nos échanges avec les équipes sur le terrain nous utilisons une
messagerie et un système de communication orale sécurisé ", explique le
porte-parole Jean-Yves Clemenzo. Il en fait la démonstration en appelant sa
collègue à Bangui, en République Centrafricaine. "Ce pays est très préoccupant pour nous en ce moment à
cause du chaos et de la situation sanitaire ", ajoute-t-il. Ce système
de communication ressemble au bien connu "Skype", mais permet des
discussions confidentielles, en toute sécurité. Son nom : Link.
Le
lien avec le terrain est quotidien dans ces bureaux. Et les salariés genevois
ont tous pour point commun d'avoir expérimenté le terrain avant d'atterrir dans ces bureaux confortables.
"J'ai été recruté en
Ethiopie. Je servais d'interprète aux médecins. Ensuite seulement, j'ai pu
intégrer cette grande maison. Ma première mission a été en Haïti. Puis il y a
eu le Congo Brazzaville, le Congo Kinshasa, le Bangladesh. Mon contrat de deux ans
à Genève n'est sans doute qu'un passage. J'ai vocation comme beaucoup d'entre
nous à retourner de nouveau sur le terrain ", confie Wolde Gabriel
Saugeron, Franco-éthiopien de 40 ans, membre du département
"Afrique".
C'est cette connaissance du terrain
qui permet à la Croix-Rouge d'être un interlocuteur de plus en plus
incontournable pour les chefs d'Etat et les responsables des Nations Unies.
Ils viennent régulièrement ici à Genève en visite au siège du CICR. L'an passé,
Ban Ki-Moon lui-même a fait le déplacement.
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