Brésil 2014 : l'hiver sera chaud, nouvelles manifestations en vue
On s'en souvient, le mois de
juin avait été particulièrement agité au Brésil, avec de grandes manifestations : jusqu'à 1 million de personnes dans les rues, le 20 juin.
Au départ, c'est
l'augmentation du prix du bus qui avait mis le feu aux poudres à Sao Paulo, mais
la contestation s'était étendue à tout le pays et à diverses revendications, les
Brésiliens dénonçant à la fois la précarité des services publics (les transports
donc, mais aussi la santé et l'éducation) et les dépenses colossales de l'argent
public, pour l'organisation de la Coupe du monde.
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La grève des enseignants
Que s'est-il passé depuis ? D'abord, un autre
grand mouvement de protestation a été organisé à Rio, à l'initiative cette fois
des syndicats enseignants : une grève des professeurs et de nombreux défilés qui
ont duré trois mois, d'août à octobre dernier, mettant à nouveau dans la rue des
dizaines de milliers de personnes, des enseignants, des élèves, mais aussi toute
une partie de la population s'y joignant par solidarité.
Parallèlement, régulièrement de petites
manifestations ont lieu ici et là sur divers thèmes, comme le raconte Ivanete
conceiçao, du syndicat des enseignants SEPE-Rio : "Apres juin, on a eu cette grande
mobilisation : trois mois de manifestations, pour défendre l'éducation publique", rappelle-t-elle.
"Mais partout, le niveau de pression reste très élevé : la précarité du
transport, la question de la santé publique, les expulsions des favelas dues a
la coupe du monde, tous les jours, vous avez des points de conflit. Hier encore,
il a beaucoup plu, des quartiers ont été inondés, privés d'électricité, et les
gens sont descendus dans la rue manifester. Il y a donc des mobilisations plus
petites, avec des revendications localisées mais la tendance c'est qu'elles
s'amplifient, et s'unissent, pas seulement à Rio, mais dans tout le
pays ", explique la syndicaliste.
Le retour de la mobilisation populaire
Car c'est l'un des héritages de ces mouvements de
juin : le retour de la mobilisation populaire, qui avait disparu du paysage
brésilien ces dernières décennies.
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Les quelques concessions du gouvernement
ont montré aux manifestants qu'ils pouvaient transformer leur réalité. Des
concessions qui n'ont pas suffit à faire retomber la grogne, bien au contraire,
comme l'analyse Renato Cinco, conseiller municipal pour le parti PSOL (Parti
socialisme et liberté) : "On a arraché quelques
victoires concrètes : notamment la réduction du prix du billet de bus, même si
ce n'était que 20 centimes, cela a porté un coup à l'arrogance de nos
gouvernants ", avance-t-il.
"Du coup, je crois que la grande leçon qu'en a tiré la
population, c'est que les luttes sociales peuvent déboucher sur des conquêtes,
le grand gain de ces manifestations, c'est d'avoir enclenché le retour des
mobilisations sociales, qui étaient à l'arrêt dans le pays, c'est ça le plus
grand résultat ", affirme le conseiller municipal.
La jeune génération en avant
Une prise de conscience notamment pour la jeune
génération, qui n'avait jamais eu l'habitude de descendre dans la rue, avant le
mois de juin. Kenzo, 23 ans, était de toutes les manifestations et participe
aujourd'hui aux nombreux débats, réunions qui sont organisés justement pour
préparer le terrain des futures mobilisations. Après la spontanéité des
mouvements de juin, l'heure est à l'organisation.
"Juin a complètement changé le visage du
Brésil ", dit-il. "Mais c'était un mouvement super spontané, à présent, c'est fondamental
qu'on essaie de mieux organiser ces manifestations, pour avancer : comment
peut-on mettre la pression sur les représentants de l'Etat, pour que ce soit
constructif, et que cela les force à concéder de nouveaux droits pour la
population ".
2014, année électorale
2014 s'annonce déjà tendue, car c'est une année
électorale (élections présidentielle, des gouverneurs d'Etat, des sénateurs -1/3
du Sénat renouvelé - , députés fédéraux, et députés d'Etats). C'est aussi l'année
de la Coupe du monde, et cela risque de cristalliser les motifs
d'insatisfaction, qui restent nombreux, comme le prévoit Roberto Leher,
professeur à l'Université fédérale de Rio spécialiste en politiques
publiques : "2014 au Brésil, ca va être très chaud, car
la Coupe du monde symbolise tout ce que la population ne supporte plus : avoir un
spectacle dont ils ne pourront pas profiter, des travaux qui sont faits pour
bénéficier à une minorité, les droits sociaux de base laissés de côté, quand il
y a tellement de ressources gaspillées dans des activités mercantiles ", explique-t-il.
"Pendant la
coupe du monde, le Brésil sera en ébullition" (Roberto Leher)
La mobilisation pourrait même reprendre dès
janvier, car le maire de Rio vient d'annoncer une nouvelle augmentation du prix
du bus pour le 1er mois de l'année, précisément ce qui avait été
l'étincelle des grands mouvements de juin.
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