Les investisseurs qataris aiment la belle pierre parisienne
Deux mois de tractations, d'offres et de surenchères.
Groupama, propriétaire de cet immeuble de 27.000 m2, était en difficulté financière.
La mutuelle d'assurances a fini par trancher entre les Américains et les Qataris, ce sont ces derniers qui l'ont emporté, moyennant plus de 500 millions d'euros.
Quand les financiers espèrent une rentabilité rapide, le Qatar a le luxe du temps.
Mais n'ont ils pas payé trop cher ? "Non, absolument pas", tranche Nicolas Verdillon de CBRE, conseil en immobilier d'entreprise. "Leur échelle de temps pour rentabiliser l'investissement, c'est 10, 12, 15 ans voire plus. Cela permet de lisser d'éventuelles récessions, d'éventuelles baisses du marché. Cet avantage, cette vision à long terme permettent de mettre le petit plus pour emporter un appel d'offres", poursuit-il.
Et quand ils sont décidés à acquérir un bien, les Qataris ne sont pas toujours très élégants. Un riche industriel français l'a découvert à ses dépens récemment.
Il voulait acheter un immeuble parisien, un accord avait été trouvé avec le propriétaire.
Et au dernier moment, juste avant la signature, un investisseur du Qatar lui a soufflé l'affaire.
"Une attitude à la limite de la correction", commente un spécialiste.
Hôtels de luxe et immeubles de prestige
Ces dernières années, ils ont également jeté leur dévolu sur des hôtels parisiens de luxe.
Le Royal Monceau pour plus de 300 millions d'euros après rénovation, l'Hôtel du Louvre et le Concorde Lafayette, plus deux palaces de la Côte-d'Azur, pour un total d'environ 750 millions d'euros.
Jusqu'ici, ils étaient clients de ces prestigieuses adresses, les voici propriétaires.
Ange Romiti est donc leur salarié, il travaille dans l'un de ces hôtels.
Il est aussi en charge de la branche hôtellerie à la CGT et il se demande ce que le Qatar vient faire dans ce secteur : "Aujourd'hui, on ne sait pas trop ce qu'ils veulent. Ces investisseurs du Qatar ont-ils une stratégie purement financière ou s'agit-il de réelles stratégies d'entreprises ? Pour l'heure, ils n'ont pas démontré qu'ils avaient de véritables stratégies d'entreprises", explique-t-il.
L'immeuble qui héberge le Figaro ou des hôtels particuliers, comme celui du 19, place Vendôme, acquis pour 230 millions d'euros : les belles pierres parisiennes plaisent beaucoup au Qatar.
Comme l'Hôtel Lambert, sur l'Ile Saint-Louis. À peine acheté en 2007, il a été entièrement restauré. L'association Paris Historique s'en est émue, estimant que des trésors d'architecture étaient menacés. Un sujet sur lequel ces bénévoles ne s'expriment plus. "Nous n'y sommes plus autorisés", écrivent-ils. "Nous sommes tenus par un accord que nous avons passé avec le propriétaire". Fin de citation et de l'histoire.
Le Qatar fait parler de lui, sa fortune impressionne. Mais ceux qui croient que ses investissements dans l'immobilier ne sont pas réfléchis se trompent. "Cette rumeur est complètement fausse", affirme Gilles Ricour de Bourgies, président de la Fédération Nationale de l'Immobilier (FNAIM) en Ile-de-France. "D'abord, ils ont un réseau de contacts en France qui repère les biens. Ensuite, leurs propres banquiers et fiscalistes viennent voir le bien. Enfin, l'investisseur lui-même débarque et les choses se font assez vite parce que les dossiers sont particulièrement bien préparés à l'avance". Ces riches Qataris ont une constance dans leurs investissements immobiliers à Paris. Ils ne visent que les beaux quartiers et les immeubles de prestige. Le reste ne semble pas exister à leurs yeux.
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