Sénégal : la fin de la pêche européenne dans les eaux sénégalaises
La date butoir est donc fixée à dimanche 17 novembre 2024 à minuit. À compter de cette date, les bateaux de pêche européens devront quitter les eaux du Sénégal, où ils avaient le droit d'exercer depuis cinq ans, en vertu d'un accord entre Bruxelles et Dakar. Un accord qui ne sera finalement pas renouvelé.
"Il ne serait pas cohérent pour l'Union européenne, qui a une politique de tolérance zéro à l'égard de la pêche INN (illicite, non déclarée et non réglementée) de renouveler un accord avec des pays qui ont été notifiés de ce type de difficultés" a expliqué mardi 12 novembre l'ambassadeur de l'UE Jean-Marc Pisani. L'Union européenne avait effectivement adressé un "carton jaune" au Sénégal au printemps dernier, invoquant des "défaillances" des autorités de Dakar dans la lutte contre la pêche illicite.
Le son de cloche n'est pas le même à Dakar, alors que gouvernement sénégalais revendique la décision de ne pas prolonger l'accord. "L'État n'était pas encore dans une logique de négocier" a rétorqué la ministre des Pêches, Fatou Diouf. "Dès mon arrivée ici, avant même qu'on ait reçu le carton jaune, j'avais commandité une évaluation et cette évaluation, elle est en cours". Une position de souveraineté face aux Européens, qui répond aussi à la colère des pêcheurs sénégalais, qui dénoncent depuis longtemps la raréfaction du poisson, et la présence de bateaux usines étrangers, quand, eux, pêchent encore pour la plupart à la pirogue traditionnelle.
La pêche, enjeu majeur au Sénégal
Au-delà du symbole culturel, la pêche représente la première activité du pays, avec environ 50 000 pêcheurs, et au moins 600 000 emplois directement liés au secteur, soit presque 20% de la population active du pays. Arrivé au pouvoir il y a huit mois, le nouveau président, Bassirou Diomaye Faye, a promis aux Sénégalais de leur rendre les revenus des ressources naturelles du pays. Une crise qui intervient alors que le président doit affronter des élections législatives cruciales dimanche 17 novembre 2024, jour du terme de l'accord.
De quoi justifier, peut-être, la teneur des réactions. Mais l'audit commandé par le président à son arrivée au pouvoir doit aussi et surtout répondre à l'omniprésence de bateaux chinois dans la région. Si la Chine n'a jamais signé d'accord de pêche avec Dakar, ses bateaux pullulent et pillent littéralement les ressources au large des côtes de l'Afrique de l'Ouest, où le taux de surpêche est estimé à plus de 50%. Un chiffre inquiétant, alors que 20% des poissons pêchés illégalement dans le monde le sont dans la région. Une manne gigantesque, de plusieurs milliards pour les pécheurs chinois, car la région constitue un paradis pour la pêche avec un écosystème d'une richesse incroyable.
Pour échapper aux contrôles ou aux sanctions, ces chalutiers chinois utilisent désormais des prête-noms, et passent sous pavillon sénégalais. Une pratique difficile à quantifier, mais manifestement largement répandue. De son côté, Dakar a promis de s'y attaquer, mais les contrôles restent très limités, alors que les scientifiques s'alarment d'un effondrement des espèces.
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