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La BCE sans "elles"

Pour dénoncer l'absence totale de femmes, le Parlement européen a rejeté cette semaine la candidature du luxembourgeois, Yves Mersch, au directoire de la Banque centrale européenne. Un véritable camouflet pour les 27, d'autant plus que c'est la première fois que les eurodéputés refusent ainsi une nomination. Reste à savoir si les Etats membres tiendront compte de ce qui, juridiquement, reste un simple avis consultatif.
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Après un bras de fer qui aura duré plusieurs mois, les députés européens ont mis leur menace à exécution : par 325 voix contre 320 et 49 abstentions, ils ont rejeté le choix des dirigeants européens de nommer Yves Mersch au directoire de la Banque centrale européenne. Ils estiment que la présence d'une femme parmi les 23 membres du Conseil des gouverneurs (dont six du directoire) de la BCE ne pouvait attendre 2018, date prévue du prochain renouvellement. Or pour ce poste, vacant depuis le mois de mai, tous les candidats étaient des hommes.

Il n'y a pourtant pas de pénurie de candidates qualifiées, estiment les eurodéputés, et la nomination de l'une d'elles "effacerait un peu l'impression que c'est un club de vieux garçons ", souligne Philippe Lamberts du groupe des Verts.

En pointe de ce combat, Sylvie Goulard, élue Modem du groupe Alliance des libéraux et des démocrates pour l'Europe, qualifie le vote du Parlement européen de "belle victoire, qui était à l'origine loin d'être acquise ". Elle demande au Conseil européen de "faire preuve de bon sens, en retirant la candidature de M. Mersch, en proposant de nouveaux candidats et en remettant à plat le processus de nominations au sein des organismes européens ".

Agé de 63 ans, gouverneur de la Banque centrale du Luxembourg depuis 1998, Yves Mersch apparaît comme la victime d'une question qui le dépasse, celle de la difficulté à appliquer la parité hommes-femmes dans l'Union. "Ses compétences ne sont pas en cause " n'ont cessé de répéter ses défenseurs, à commencer par le président du Conseil européen Herman Van Rompuy, qui a appelé le Parlement européen à mettre fin au blocage, mais sans s'engager sur une amélioration de la situation.

Pourtant la prestation du socialiste Yves Mersch lors de son audition en début de semaine avait été jugée trop faible, la gauche lui reprochant notamment son conservatisme. "Même si Yves Mersch était une femme, nous n'aurions pas voté pour lui ", a souligné la délégation socialiste française.

Robert Goebbels, socialiste luxembourgeois, estime au contraire que son candidat paie le fait de venir d'un petit pays, critique le fait que les élus des pays non membres de la
zone euro puissent prendre part à ce vote secret, et souligne que la question de la parité ne
s'était pas posée l'an dernier pour la nomination du Français Benoît Coeuré au même directoire de la BCE.

Le choix d'Yves Mersch s'était imposé en juillet, notamment parce que le président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, Luxembourgeois lui aussi, avait accepté de rester à son poste six mois de plus à condition que son compatriote soit nommé à la BCE. D'autant plus qu'Yves Mersch est considéré comme partisan d'une politique monétaire rigoureuse, proche de celle défendue par la Bundesbank, ce qui lui avait donné les faveurs de l'Allemagne.

Berlin a d'ailleurs immédiatement fait savoir que le gouvernement allemand maintenait son soutien, malgré le vote négatif du Parlement européen. Une "provocation" dénoncée par le président du groupe Alliance des libéraux et des démocrates pour l'Europe, Guy Verhofstadt, alors que le Parlement européen s'apprête à recevoir la chancelière Angela Merkel. "Même s'il en a le droit juridiquement, politiquement il ne peut passer outre l'avis du Parlement européen sur une question aussi fondamentale ", souligne l'ancien Premier ministre belge. Au Conseil on dit "examiner avec attention la situation à la lumière du vote et de l'urgence de pourvoir le poste vacant".

Seules deux femmes ont siégé au directoire de la BCE depuis sa création en 1998. La Finlandaise Sirkka Hamalainen jusqu'en 2003, puis l'Autrichienne Gertrude Tumpel-Gugerell jusqu'en 2011. Elle avait été remplacée par un Belge, qui avait alors été préféré à une candidate slovaque.

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