En Espagne, la restauration d'une église romane suscite la polémique
Des fissures sur les murs de l’église de Santa María del Castillo, dans la région de Valladolid, ont été grossièrement colmatées. C’est loin d’être le premier raté dans ce pays. Certaines voix s'élèvent d'ailleurs pour que seuls les restaurateurs professionnels puissent retoucher les œuvres d’art.
Le désastre s’est produit dans le petit village de Castronuño, dans la province de Valladolid, dans la région de Castille et León, en Espagne. L’église de Santa María del Castillo, joyau de l’art roman et déclarée monument historique artistique en 1962, a fait l’objet d’une curieuse "restauration". Récemment, un habitant du village publiait des photos de l’église sur lesquelles apparaissaient des fissures sur les murs, colmatées...avec du ciment !
A través de Redes Sociales se ha mostrado una intervención nefasta en la iglesia de Santa María del Castillo en Castronuño, #Valladolid, una situación no conocida por la Comisión de Patrimonio de la @jcyl. https://t.co/67m3za4S0L pic.twitter.com/IB1xqNhrGI
— Caminos del Románico (@CdRomanico) November 8, 2021
Cela a bien sûr suscité la polémique et rappelle d’autres "piteuses restaurations". La première dont les médias espagnols et étrangers se sont largement fait l'écho remonte à 2012. La fresque du XIXème siècle complètement défigurée: l’Ecce Homo du village de Borja, près de Saragosse. Cecilia, une octogénaire, avait voulu restaurer l’œuvre, une fois de plus, avec l’autorisation du curé de l’église d’après elle, à l’entendre, Cecilia croyait juste bien faire: "Le salpêtre ça part. Moi j'arrange le truc à chaque fois. Mais cette année je n’ai pas eu le temps", déclarait-elle.
Une restauration ratée qui avait aussi fait réagir Teresa García, la petite-fille de l’auteur de la peinture du Christ de Borja: "Jusqu’à présent, elle n’avait retouché que la tunique mais le problème cette fois-ci, c’est qu’elle s’en est pris à la tête et, bien évidemment, elle a détruit le tableau." Un tableau ruiné qui a près de 130 ans d’Histoire. L’exemple de Borja n'est malheureusement que le premier d’une longue liste de restaurations ratées qui défigurent le patrimoine artistique et historique espagnol.
Entre dérision et consternation
Certains Espagnols tournent ça à la dérision. À tel point que le petit village de Borja et Cecilia sont devenus célèbres, et son Ecce Homo s’est même retrouvé imprimé sur des tee-shirts, tasses et autres objets publicitaires. Mais beaucoup d’Espagnols, au contraire, s’insurgent, tout comme les professionnels de la restauration qui sont indignés. "Ceci n’est pas une restauration, c’est un acte de vandalisme", dénonçait l’année dernière le président de l’association professionnelle de conservateurs-restaurateurs d’Espagne lorsqu’il découvrait avec horreur à quel point une statue située sur la façade d’un bâtiment historique de la ville de Palencia avait été défigurée. Il rappelait que seuls les restaurateurs professionnels devraient pouvoir retoucher les œuvres d’art. Mais le problème, selon eux, c’est que la restauration et la conservation de l’art et du patrimoine n’est pas suffisamment régulée en Espagne, tout comme la profession de conservateur-restaurateur.
Concrètement, dans les lois sur le patrimoine national et régional, il n’apparaît pas clairement qui sont les professionnels qualifiés qui doivent restaurer les œuvres d'art. Résultat : n’importe quel restaurateur "amateur", sans aucune expérience, ni formation peut se lancer et, au pire, en cas de tollé, il ne sera passible que d’une amende. Sans parler du manque de moyens dont souffre le patrimoine espagnol qui, à l’heure actuelle, n’est pas suffisamment préservé.
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