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En Suisse, le théâtre transfigure le centre commercial pour faire réfléchir à la société de consommation

La balade au centre commercial pourrait changer de dimension grâce à deux metteurs en scène venus de Suisse. Igor Cardellini et Tomas Gonzalez proposent aux spectateurs une visite guidée et décalée de l’un de ces temples du commerce.

Article rédigé par franceinfo - Jérémie Lanche, édité par Ariane Schwab
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
"Voir c'est vendre". Dans un centre commercial, jusqu'à la transparence des rambardes n'est pas anodine (illustration). (AURELIEN MORISSARD / MAXPPP)

La visite au centre commercial est pour certains, un moment d’angoisse. Pour d’autres, un plaisir assumé. Et désormais, un lieu de spectacle vivant du Théâtre Vidy-Lausanne. Deux metteurs en scène suisse, Igor Cardellini et Tomas Gonzalez, ont en effet eu l’idée de l’utiliser comme scène et en proposent une visite guidée, intitulée L’Âge d’or.  

Et comme toutes les visites guidées, elle se fait en groupe, avec une casquette jaune poussin sur la tête et un casque sur les oreilles pour mieux entendre la guide, Marion Duval, en réalité comédienne. On a tendance à l’oublier parce qu’elle joue son rôle à fond. Et son rôle, c’est d’expliquer comment se construit et s’organise le centre commercial Métropole de Lausanne.

Suivez la guide !

Le mall Métropole de Lausanne c'est 21 000 mètres carrés de surface commerciale, 18 000 visiteurs par jour et une température maîtrisée en toutes saisons : "Elle est comprise entre 21 et 24 degrés toute l’année. Victor Gruen, qui a été l’un des premiers concepteurs de mall, a appelé cette fraîcheur ‘une sensation de printemps éternel’", explique la guide.  

Et tout est vrai dans cette visite, certes décalée mais bourrée d’informations. On apprend par exemple qu’auparavant, le sol des centres commerciaux était en marbre pour ne pas freiner les clients dans leurs achats. Et que si les malls sont si tristes, c’est pour ne pas voler la vedette aux vitrines des magasins. "Le principe fondamental d’organisation c’est la visibilité, qui a été maximisée. Une fois à l’intérieur, les clients doivent immédiatement apercevoir toute l’offre, toute l’abondance à portée de main. Vous voyez : les rambardes, les devantures, les ascenseurs sont tous transparents. Voir, c’est vendre", poursuit Marion Duval.  

Bientôt en France

La visite, ou le spectacle, on ne sait plus, dure une heure. Et passé le premier moment de gêne, il faut avouer que c’est assez amusant de se balader au milieu des clients et des commerçants qui se demandent un peu ce que des touristes font là. La démarche reste toutefois très ambiguë, car si on vous révèle l’envers du décor des centres commerciaux, on participe aussi à faire leur promotion. Certains visiteurs disent avoir été mal à l’aise, d’avoir le sentiment de participer, malgré eux, à la société moderne que le spectacle critique en réalité. Tomas Gonzalez est l’un des deux metteurs en scène de L’Âge d’or. Et il assume complètement la démarche : "Dans le centre commercial, en même temps on fait la visite, on devient des hommes et des femmes-sandwich et on est amené à consommer. Et peut-être même que ce à quoi on participe, cet objet culturel, c’est de la consommation."

"On amène les gens à réfléchir par une reproduction de ce pouvoir, de cette force qui agit sur nous quand on est simplement client ou cliente de cet espace."

Tomas Gonzalez, co-metteur en scène de "L’Âge d’or"

à franceinfo

Cette volonté de percer à jour les emblèmes du capitalisme est au cœur de L’Âge d’or. Il s‘agit en fait d’un triptyque. Avant le centre commercial, Tomas Gonzalez et Igor Cardellini ont organisé une visite d’une société d’assurance. La prochaine fois, ce sera une banque, même s’ils ont beaucoup de mal à trouver un établissement qui veuille bien se prêter au jeu. Mais avant cela, L’Âge d’Or va s’exporter ailleurs en Europe, notamment en France avec des visites prévues dans ces centres commerciaux de Marseille, Lyon et Lille.

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