En Tunisie, la liste des martyrs et blessés de la révolution vient enfin d'être publiée
Après dix ans d'attente, la liste des martyrs et blessés de la révolution de 2011 en Tunisie vient enfin d'être publiée au Journal officiel. Mais il y a la tristesse et le désarroi de milliers de personnes qui ne comprennent pas pourquoi leurs noms n'y figurent pas.
Près de 129 personnes sont mortes et 634 ont été blessées lors des affrontements entre manifestants et forces de l'ordre, entre le 17 décembre 2010 et le 14 janvier 2011. La liste des martyrs de la révolution qui a renversé le régime de Ben Ali en 2011 a été publiée par les autorités tunisiennes. Un soulagement pour ces familles. D'un côté, il y a ces blessés, souvent amputés, victimes à l'époque des tirs des snipers. Ils pourront enfin avoir accès à une prise en charge médicale gratuite ainsi qu'à des compensations financières.
"L'argent n'est pas notre première préoccupation", confie Omar, qui tient une petite boutique de souvenirs. Cette reconnaissance, il l'attendait depuis dix ans. Lors de la révolution, alors qu'il manifeste comme tant d'autres, un policier lui brise le bras droit à coups de matraque. Une double fracture qui ne sera jamais réparée. Son bras, dont il ne peut pratiquement plus se servir, le fait encore souffrir aujourd'hui. Lorsqu'il a vu son nom et celui de ses compagnons enfin publiés, il a ressenti un immense soulagement. "Ce que nous souhaitions d'abord et avant tout, c'est la reconnaissance, estime-t-il. Aujourd'hui, l'État nous reconnaît en tant que martyrs et blessés de la révolution. Ce que nous voulons, c'est une prise en charge médicale. Il y a 34 personnes qui attendent toujours des prothèses, ça c'est la toute première chose. Et puis, il faudra juger les coupables."
1 500 victimes n'y figurent pas
L'autre problème, c'est que beaucoup de Tunisiens qui s'estiment blessés ne trouvent pas leurs noms sur les listes publiées par l'État tunisien. Et ce n'est pas faute de chercher. Elles sont 1 500 victimes parmi lesquelles on retrouve Souad, âgée de 37 ans. À l'époque, la révolution vire pour elle au cauchemar. Elle tombe sur un barrage policier et se fait tirer dessus à trois reprises, "une balle au sein gauche, deux balles à l'épaule". "Moi, je veux la justice, confie-t-elle. Je veux savoir pourquoi il a tiré sur moi, et qui c'est. Je dois prendre des calmants pour pouvoir dormir... Traumatisée, c'est ça. Et après tout cela, je ne trouve pas mon nom dans la liste. Pas seulement moi, mais des amis aussi."
À son traumatisme, ses douleurs, s'ajoute cette claque inouïe de ne pas figurer sur la liste. Avec tous ses compagnons dans le même cas, elle promet de continuer à se battre.
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