Manifestations en Iran : en Malaisie et en Indonésie, des activistes tentent d'interroger la place de la religion dans la société
Ces militants des droits des femmes, dont les rares manifestations sont réprimées, regrettent que l'onde de choc de la contestation iranienne ne secoue pas davantage les deux pays musulmans.
En Indonésie, pays qui compte le plus de musulmans au monde, et en Malaisie, où l'islam est religion d'État, le mouvement de protestation iranien suscite l'émoi de certains activistes qui rappellent qu'en Asie du Sud-Est aussi les pressions sont grandissantes pour forcer les femmes à porter le voile. Les autorités n'ont, elles, pas mentionné cette actualité mondiale, et débattre publiquement du port du voile ne semble pas tellement leur plaire.
L'islam instrumentalisé par des politiques malaisiens
En Malaisie, le rassemblement devant l’ambassade d’Iran en soutien aux protestations s’est ainsi soldée par la convocation au poste de police de certains de ses participants. Parmi eux, Siti Kasim, avocate malaisienne musulmane non voilée, qui se désole du peu d’écho qu’a dans son pays le mouvement de protestation iranien. "C’est vraiment décevant que le gouvernement, les politiciens, les médias grand public ne parlent même pas de cela. Heureusement qu’il y a Twitter pour savoir ce qu’il se passe là-bas", explique-t-elle.
MORAL POLICING/RELIGIOUS TYRANNY
— Siti Kasim (@sitikasim) September 26, 2022
Last night, I went 2 support d Iranians on d death of Mahsa Amini. Shes arrested by Iranian moral police bec she didn't wear her hijab properly. If u think this will never happen in Msia, think again.#mahsaamini #IranProtests #religioustyrannyp pic.twitter.com/WfSUVpT4VU
Mais si l’avocate est déçue de ce silence politique dans son pays, où désormais la majorité de ses concitoyennes musulmanes sont voilées, elle n’en est pourtant pas vraiment surprise : "D’année en année je vois de plus en plus les politiciens utiliser la religion musulmane comme un outil pour inciter la majorité de la population qui est musulmane à voter pour eux, en se posant comme des défenseurs puritains de l’Islam", dénonce-t-elle.
Une lycéenne relance le débat en Indonésie
À l’heure actuelle, rien n’oblige les femmes musulmanes malaisiennes ou indonésiennes à porter le voile, mais cela peut devenir obligatoire dans certaines provinces pour les fonctionnaires, ou encore en Indonésie via l’école. En Indonésie justement, pays à la constitution laïque dont la ministre des Droits de la femme n’est pas voilée, l’histoire d’une lycéenne de Sumatra a fait la une de l’actualité. L'année dernière la famille de cette jeune fille non musulmane s’était publiquement insurgée du voile imposé par l’uniforme scolaire. Le ministère de l’Education avait suite à cela signé un décret assurant la liberté de se voiler ou non pour les élèves et professeures de tout le pays, mais celui-ci a été finalement rejeté par la cour suprême quelques mois plus tard.
Que le voile s’invite ainsi dans l’actualité demeure relativement nouveau dans ces pays à majorité musulmane d’Asie du Sud-Est où il y a quelques années le port du voile était très minoritaire. Pour les chercheurs qui se sont penchés sur le sujet, sa généralisation s’explique ainsi plus par des facteurs politiques et sociétaux ou des influences étrangères que pour des raisons religieuses.
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