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"Mon patron ne communique avec moi que par sms" : en Corée du Sud, le mouvement #meetoo exclut les femmes au bureau

En Corée du Sud, le mouvement mondial #metoo, a des effets pervers en entreprise. De nombreux hommes réduisent les interactions avec leurs collègues féminines. Elles sont ainsi exclues des dîners de bureau ou des voyages d’affaires.

Article rédigé par franceinfo, Frédéric Ojardias
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Des Coréens et des Coréennes se rendent au travail à Séoul, en Corée du Sud. (MAXPPP)

La Corée du Sud est un pays très patriarcal. Les femmes osent rarement parler en cas de harcèlement sexuel ou de viol, mais le phénomène mondial baptisé #metoo a servi d’exemple. Les révélations se multiplient dans les milieux artistiques, politiques ou universitaires.

Le cas le plus médiatisé est celui de Ahn Hee-jung, un gouverneur progressiste, considéré comme l’un des favoris à la prochaine élection présidentielle. Il est accusé de viol par deux employées. Des professeurs, des acteurs, ou encore le célèbre réalisateur Kim Ki-duk sont eux aussi sur sa sellette.  

La "règle Mike Pence"

Dans ce contexte, des entreprises appliquent la règle "Mike Pence" du nom du très prude vice-président américain. Elle est surnommée ainsi parce que Mike Pence a un jour déclaré qu’il refusait tout dîner en tête à tête avec une femme autre que la sienne. Le monde très masculin de l’entreprise sud-coréenne semble avoir adopté cette règle : "Mon patron ne communique avec moi que par sms, j’ai l’impression d’être devenue invisible au bureau", témoigne ainsi une employée sud-coréenne dans le quotidien Chosun.

D’autres femmes racontent être exclues des dîners entre collègues et même être interdites de voyages d’affaires. Dans le quotidien Korea Times, un homme de 46 ans explique qu’il évite dorénavant de parler à ses collègues féminines. "Tout ce que je peux dire pourrait être interprété comme du harcèlement sexuel", a-t-il expliqué. Un autre homme de 31 ans a demandé à son patron de ne pas être envoyé en voyage d’affaires avec d’autres employées féminines. Il assure ne communiquer avec celles-ci "que par internet".

Des discriminations prises au sérieux

La ministre pour l’égalité des sexes, Chung Hyun-back, a déclaré la semaine dernière, que cette "règle Pence" était "inquiétante". Elle a promis de mener diverses campagnes de sensibilisation, pour "empêcher cette tendance de se propager". Les Coréennes sont déjà très désavantagées au sein de l’entreprise. Le plafond de verre est épais et très bas en Corée du Sud. Le pays se trouve à la 118e place sur 144 dans un classement du Forum économique mondial en matière d’égalité des sexes. La règle "Mike Pence" risque encore d’aggraver la situation.    

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