L'Etat et la société face au racisme et à l'antisémitisme
Ce matin, le président de la République s'est exprimé en marge d'un déplacement pour saluer les efforts sans précédent de la justice et de la police pour avoir identifié un suspect après la tuerie antisémite de Bruxelles. Régulièrement, il participe aux diners du CRIF, commémore les Justes, accueille à l'Elysée les représentants des communautés juives ou musulmanes. Il fait de la lutte contre le racisme et l'antisémitisme une cause nationale.
Il a poursuivi la "Une" de Minute où la ministre Christiane Taubira été comparée à un singe ou encore le spectacle de Dieudonné. La semaine dernière, François Hollande a immédiatement souligné le caractère antisémite de la fusillade perpétrée au musée juif de Bruxelles.
Plusieurs formes de racismes et d'antisémitismes
Dès 1987, le chercheur Pierre-André Taguieff avait montré qu'il y avait plusieurs formes de racismes et d'antisémitismes. Il y a un racisme qui peut rejeter la différence, et un autre la valoriser.
Dans le premier cas, il définit une identité qui justifie ensuite une inégalité. Dans le second cas, il s'agit de faire en sorte que chaque individu appartienne à des communautés différentes qu'il faut donc séparer. Le droit à la différence est alors compatible avec la différences des droits.
D'autres racismes découlent d'un ressentiment de décadence, et il est vrai que la mélancolie française que l'on ressent actuellement engendre aussi du racisme et de l'antisémitisme.
Conséquence évidente : on ne lutte pas contre tous ces racismes de la même façon car ils ont des ressorts différents. C'était l'idée de Pierre-André Taguieff. Pour les combattre, il faut des stratégies multiples et plus subtiles. Cependant, ces travaux sont critiqués, comme a pu encore le lire dans les colonnes du Monde cette semaine. Mais ils ont le mérite de montrer que les Fronts républicains ne sont pas forcément la solution.
On peut sanctionner un journal. Mais c'est plus complexe sur Internet. Sur Twitter par exemple, les hashtags "#unbonjuif", "#simonfilsestgay" ou encore "#simafilleramèneunnoir", sont là pour le prouver.
Quelles solutions ?
La solution, on la connait : c'est l'éducation, c'est la culture, c'est l'explication, c'est la pédagogie, c'est expliquer, c'est convaincre. Cette semaine, des jeunes se sont mobilisés après la victoire aux élections européennes du Front national. Et l'on a souvent entendu la formule "des digues se sont rompues". Belle formule certes, mais pour filer la métaphore jusqu'au bout, je dirais que pour empêcher qu'une digue se rompe il faut tous se mobiliser.
Plutôt que de tout attendre de la Justice et de l'Etat, il faut peut être plus espérer de l'Ecole, des instituteurs, des travailleurs sociaux, de la société, c'est à dire de vous, de nous, de nous tous. Il n'y a pas que la justice à saisir, le Parlement à convoquer, mais il y a ce que chacun d'entre nous peut faire pour lutter contre ce que l'écrivain Albert Camus appelait, dans une métaphore efficace, la Peste.
* Pour aller plus loin :
- Pierre-André Taguieff, La Force du préjugé. Essai sur le racisme et ses doubles , La Découverte, 1988
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.