Histoire de folles rumeurs. Danone rachetée par Pepsi
Une rumeur disant que l'entreprise agroalimentaire Danone serait rachetée par une multinationale américaine PepsiCo a fait réagir les plus grands personnages de l'État français.
Nous sommes le 20 juillet 2005 et une angoisse parcourt la France en plein été. Cette angoisse, elle prend la forme d’une rumeur. Au plus haut niveau de l’État, cette rumeur n’en est presque déjà plus une. Il faut défendre Danone, le sortir des griffes de Pepsi, et c’est Dominique de Villepin, le Premier ministre qui le dit. En déplacement à Madagascar, le président de la République lui-même avait lui aussi tenu à défendre publiquement le fleuron français crée par Antoine Riboud : "S'agissant d'une grande entreprise française comme Danone, je suis avec le gouvernement particulièrement vigilant et particulièrement mobilisé". Le vocabulaire est guerrier. Mobilisation, patriotisme, défendre la France, pour un peu, on se croirait en août 1914 ou en septembre 1939. Mais le plus fou dans cette histoire, c’est qu’il s’agit d’une pure rumeur de marché.
Jamais Pepsi n’a eu l’ambition de racheter Danone
Pourtant en ce mois de juillet, tout le monde défend Danone : les syndicats, le Parti socialiste. Il n’y a que Pepsi qui s’en tient à un refus de "commenter des rumeurs". Comment tout cela a bien pu commencer ? Comme souvent dans ces affaires de rumeurs de marché, dans la presse spécialisée. D’abord, le 6 juillet dans Challenges, qui affirme que PepsiCo a pris une participation de 3% dans Danone et aurait prévu entre 25 et 30 milliards de dollars pour racheter l’entreprise française. Deux semaines plus tard, Le Financial Times affirme que PepisCo a donné mandat à deux banques d’affaires pour monter un dossier de reprise. Cette rumeur, elle profite d’abord et avant tout aux actionnaires de Danone dont le cours s’envole, évolution habituelle avant toute OPA ou toute rumeur d’OPA. En deux semaines, entre le 6 et le 20 juillet, le titre a bondi de 27%.
De là à penser que les rumeurs viennent des actionnaires, c’est toujours possible. Ne voyant rien venir de la part de PepsiCo, la rumeur s’éteint d’elle-même. Deux commentaires pour finir : pourquoi a-t-elle aussi bien pris ? Parce que c’est Danone, parce qu’il y a toujours un fond d’antiaméricanisme et parce que la France venait de perdre Péchiney en 2003, victime d’une OPA hostile de la part du Canadien Alcan. Cette rumeur a abouti sur du réel. Le 30 décembre 2005, Villepin signe un décret visant à soumettre un certain nombre d'investissements étrangers en France à l'autorisation du gouvernement. À l'époque, le Premier ministre avait ciblé les activités liées à la défense et à la sécurité. Autrement dit, un décret qui n’aurait pas protégé Danone.
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