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Histoires d'info. Habib Benglia, cet acteur de théâtre cantonné aux rôles de Noirs

Acteur dès 1913, il a été le premier Noir à monter sur une scène parisienne.

Article rédigé par franceinfo, Thomas Snégaroff
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
L'artice Aïssa Maïga, lors du 71ème Festival de Cannes. (FRANCK ROBICHON / EPA)

Des actrices noires et métisses qui montent les marches du Festival de Cannes pour dénoncer la sous-représentation des personnes noires dans le cinéma. Une initiative d'Aïssa Maïga, comédienne française d'origine sénégalaise. Elles seront seize femmes à fouler le tapis rouge mercredi 16 mai, après la publication d'un livre tribune il y a quelques jours "Noire n'est pas mon métier." L'occasion de revenir sur la carrière d'Habib Benglia. Son nom ne vous dit peut-être rien, mais il est pourtant l’un des acteurs français qui a marqué l’histoire du théâtre français.

Premier Noir sur la scène d’un grand théâtre parisien   

À l'époque, les Blancs se passaient le visage au cirage pour jouer des Noirs. Habib Benglia, originaire du Soudan, né à Oran de parents caravaniers en 1895, était arrivé en France pour s’occuper des chameaux vendus par son père à un Européen. Il obtient un petit rôle dans une pièce en 1913, qui deviendra ensuite un succès. Mobilisé comme tirailleur pendant la Première Guerre mondiale, Habib Benglia rejoint ensuite la troupe de Firmin Gémier. Il le suit au Théâtre de l’Odéon en 1923 où Benglia devient le premier noir à tenir un premier rôle dans un théâtre national : celui l’empereur Jones dans la pièce d’Eugène O’Neill monté à Broadway trois ans plus tôt.  

Les allusions à son jeu sont rarissimes

Revers de la médaille, Benglia n’a jamais joué autre chose qu’un Noir sur scène ou  au cinéma. Il est ce qu’on appelle alors "un authentique Nègre", pas un Blanc déguisé. La presse écrit : "Habib Benglia joue le Nègre avec une parfaite vraisemblance, étant Nègre lui-même. Il n’a qu’à continuer." Il est l’incarnation des fantasmes blancs, tour à tour le corps sauvage, forcément dénudé, le corps lascif, le corps musclé. Les allusions à son jeu sont rarissimes. En 1923, le journaliste et auteur dramatique René Wisner écrit : "Un acteur joue avec son cerveau ou son visage. M. Benglia, lui, joue avec ses muscles. On peut dire de M. Benglia que sa poitrine parle, et que ses omoplates crient. La sueur l’inonde, fait reluire son torse bronzé […]. C’est de la sculpture sur soi. C’est la vie incarnée dans la chair. C’est le triomphe de l’anatomie." 

Près d’un siècle plus tard, les actrices noires vont monter les marches à Cannes ce mercredi soir devrait redire qu’elles ne sont pas qu’une couleur de peau, ni qu'un corps. 

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