Histoires d'info. Le début du mouvement indépendantiste en Nouvelle-Calédonie
Le président de la République est jeudi en Nouvelle-Calédonie pour une visite symbolique et sensible. Les rapports ont toujours été tendus entre cette zone française du Pacifique et l'État.
L'ambiance est sans doute un peu tendue pour la visite du chef de l'État, Emmanuel Macron en Nouvelle-Calédonie où il est arrivé jeudi 3 mai. Mais ce n'est pas une première.
Juillet 1979, le président Valery Giscard d’Estaing est en Nouvelle-Calédonie. L’année précédente, le vieux parti de l’Union calédonienne, poussé par une nouvelle génération de militants kanaks qui veulent se faire entendre, dont Jean-Marie Tjibaou ou Éloi Machoro, revendique pour la première fois l’indépendance. Né ainsi le front indépendiste qui deviendra en 1984 le FLNKS.
C’est donc une visite très politique que celle de Giscard. Et son discours prononcé à Nouméa le 16 juillet 1979 l’est aussi : "L'image de la France ne doit plus être ternie nulle part par les séquelles d'une époque coloniale qui s'éloigne dans le passé. C'est pourquoi la Nouvelle-Calédonie doit être une terre de fraternité, de justice et de progrès."
Des inégalités sociales flagrantes
Giscard a parfaitement compris que le ferment de l’indépendantisme repose sur des inégalités économiques et sociales entre les communautés. Plus précisément entre les Kanaks, les Caldoches et les Européens, d’où l’allusion à la période coloniale.
Considérer que la période coloniale est lointaine, c’est considérer que les inégalités qui marquaient cette période sont achevées et qu’il n’est pas question non plus d’envisager l’évolution qu’ont connu les colonies vingt ans plus tôt, c’est-à-dire l’indépendance
Mais les grands discours de Giscard se heurtent à la réalité locale. Une réalité marquée par l’intensité des inégalités qui perdurent encore : sachez par exemple pour s’en tenir au domaine si sensible de l’éducation qu’à peine 12% des lauréats au bac S sont d'origine kanak (pour 40% de la population) ou que seul un jeune Kanak sur vingt est diplômé de l'enseignement supérieur contre un Européen sur cinq.
La violence des années 1980
Des dirigeants indépendantistes sont assassinés : Pierre Declercq en 1981, Eloi Machoro et Marcel Nonnaro en 1985, au cours de ce que l’on appelle parfois une quasi guerre civile entre Caldoches et Kanaks qui s’étend de 1984 à 1988. 1988, une date capitale dans cette histoire. Antenne 2, Journal de 13h, Daniel Bilalian, le 23 avril 1988 :"Les renforts de gendarmerie et de troupes continuent d'arriver sur place mais pour l'instant les 27 gendarmes pris en otage par des militants indépendantistes, sont toujours entre leurs mains. Un dirigeant du FLNKS a dicté les conditions de leurs libérations qui passent par une annulation des élections régionales prévues pour demain en même temps que l'élection présidentielle, une discussion sur un référendum d'autodétermination et un retrait des forces de l'ordre sur l'île d'Ouvéa où a eu lieu le drame. Autant dire qu'on est encore loin d'un accord possible."
Opération Victor
Une prise d’otage qui se finit dans le sang. L’opération Victor, l’assaut, est lancé le 5 mai, à trois jours du second tour de l’élection présidentielle. 75 hommes participent à l’assaut, qui est un succès pour l’Etat : tous les otages sont libérés, seuls deux gendarmes sont blessés. Mais 19 indépendantistes sont tués, le FLNKS accuse encore aujourd’hui l’Etat d’exécutions sommaires.
Trois jours après l’assaut, François Mitterrand est réélu président de la République. Il nomme Michel Rocard Premier ministre qui constituera une mission de dialogue chargée de renouer la discussion entre loyalistes et indépendantistes. Cette mission conduira aux accords de Matignon (26 juin 1988) et à une amnistie générale pour les preneurs d’otages et les militaires impliqués dans les morts suspectes. Un référendum d’autodétermination est prévu pour 1998, avant d’être repoussé à une date entre 2014 et 2018, ce sera donc pour 2018, le 4 novembre.
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