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Ils ont fait l'actu. Alexis Antonioli, secrétaire CGT chez TotalEnergies : quand le gouvernement a failli plier sur les retraites

Retour avec Sandrine Etoa-Andegue sur les événements marquants de l'année. Et ce sont ceux qui les ont vécus qui les racontent : Alexis Antonioli, secrétaire CGT chez TotalEnergies, revient sur la fin de la grève qui a presque arrêté le pays.
Article rédigé par Sandrine Etoa-Andegue
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Alexis Antonioli, secrétaire CGT TotalEnergies de la raffinerie de Gonfreville. (LOU BENOIST / AFP)

11 avril 2023. Les salariés de la raffinerie TotalEnergies de Gonfreville, en Normandie, sont les derniers à mettre fin à leur mouvement de grève reconductible contre la réforme des retraites entamée le 7 mars. Alexis Antonioli, le secrétaire général CGT de la plus grande raffinerie de France, explique pourquoi les travailleurs avaient décidé d'aller plus loin que les appels à manifester de l'intersyndicale : "On devait tout tenter contre ce projet de réforme parce qu'on ne voulait pas avoir le regret d'avoir manqué des coches. On sait le poids que peut avoir un site comme le nôtre dans un mouvement de masse dans le pays. C'est pourquoi les salariés, en toute responsabilité, ont décidé d'exercer leur droit de grève en coupant les expéditions et, par effet domino, en arrêtant les installations."

Files interminables devant les stations-services

Le mouvement a compté 75% de grévistes au lancement de la grève en janvier, puis le taux de participation est resté suffisant. Files d'attente interminables devant les stations-services, désarroi et colère des automobilistes, Alexis Antonioli considère que c'était le meilleur outil pour faire plier le gouvernement. Le secrétaire général CGT tire surtout un bilan très critique des 14 journées de manifestation nationale passées : "L'intersyndicale a une force, notamment sur le début du mouvement, ça sert à massifier le nombre de grévistes. Là, on voit bien qu'il y a une unité syndicale. Mais pour quoi faire, l'unité syndicale, si c'est pour simplement faire 14 journées isolées de manifestations, de mobilisation, et finalement arriver à la toute fin de la grève en disant : bon, ben ça sert à rien. Chose qu'ils savaient depuis le début !"

Il déplore encore : "C'est pendant le conflit qu'il fallait y aller. On avait une situation où 94% des actifs rejetaient la réforme, on avait un soutien massif aux grévistes. Les propos de Laurent Berger et d'autres sur le fait de ne pas mettre l'économie à genoux, de ne pas aller vers la reconductible, ce sont des éléments de langage qui ont démobilisé chez nous, puisque la première réaction d'une partie des travailleurs, ça a été de nous dire en fait : on refait comme en 2016."

"Un moment quasiment pré-révolutionnaire"

Sur le site de la raffinerie normande, la grève reconductible a donc démarré le 7 mars et il y a eu un arrêt des installations au moment du 49.3 jusqu'au 12 avril, "on a mis le curseur pas loin du maximum" résume Alexis Antonioli. Une mobilisation qui l'a occupé sept jours sur sept et qui a occasionné des pertes de salaire entre "900 et 1400 euros". Une caisse de grève "qui a atteint les 75 000 euros" a compensé en partie ces pertes en étant redistribuée de façon équitable entre les grévistes.

Alors que la réforme s'appliquera dès la rentrée, le représentant syndical reste persuadé que le gouvernement aurait pu céder, notamment au moment du 49.3 si l'intersyndicale avait maintenu la pression. Selon lui : "On voyait qu'il y avait un moment qui était quasiment pré-révolutionnaire, où on avait finalement une radicalité qui s'est exprimée de partout. Et l'un des reproches qu'on fait, nous, c'est d'avoir calé le calendrier de la lutte sur celui du Parlement en laissant supposer aux travailleurs qu'il y avait une chance de ce côté-là. (...) Je pense que le rôle de syndicaliste convaincu à ce moment-là, ce n'est pas de faire ça, c'est justement d'organiser les choses pour que le gouvernement n'ait pas d'échappatoire et qu'il recule."

Le souvenir des réquisitions

Sur le site de Gonfreville, le travail a repris, mais la mobilisation a laissé des traces, notamment au moment des réquisitions de grévistes raconte Alexis Antonioli : "C'est quand même la première fois qu'on a des CRS qui viennent sur le piquet de grève pour accompagner les travailleurs réquisitionnés, qui viennent aussi empêcher la tenue d'assemblées générales pendant le mouvement. Il y a une vraie colère qui s'exprime et qui reste. Si on revient sur la situation, il restait globalement deux jours de kérosène aux aéroports parisiens. Puis les forces de l'ordre ont eu extrêmement de mal, les huissiers également, à trouver les salariés réquisitionnés. Quand vous êtes réquisitionnés chez vous, dans votre famille, avec vos enfants et que vous devez expliquer pourquoi papa, il est emmené par la police pour aller travailler... Ça a été la phase la plus intense de ce conflit."

Réforme ou pas, Alexis Antonioli dit rester mobilisé sur la question des salaires, des conditions de travail, notamment, dit-il, à propos de l'exposition des opérateurs à des produits cancérigènes. Lui qui est chez Total depuis 2006, mais a commencé à travailler jeune à 18 ans, peut prétendre à un départ anticipé à la retraite entre 57 et 59 ans.

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