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Ils ont fait l'actu. Ludovic Franceschet, l'éboueur militant

Il est éboueur et fait la promotion de son "métier de rêve" sur les réseaux sociaux. Une façon pour lui d'expliquer le quotidien et la mission de ces hommes qui nettoient nos rues. Ludovic Franceschet revient également sur la réforme des retraites, qu'il a combattue.
Article rédigé par franceinfo, Sandrine Etoa-Andegue
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Ludovic Franceschet à Paris, été 2023 (SANDRINE ETOA-ANDEGUE / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

11 mars 2023. Dans la soirée, le Sénat, dominé par la droite, adopte le projet de loi contre la réforme des retraites. Après le recours à la procédure dite du vote bloqué qui permet d'accélérer les débats, c'est une première victoire pour le gouvernement alors que c'est déjà la septième journée de mobilisation dans la rue contre cette réforme et que les éboueurs, comme Ludovic Franceschet à Paris et star sur TikTok, sont en grève.  "On ne lâchera pas !" dit-il alors. Le 12 mars, des milliers de tonnes de déchets s'amoncellent dans les rues parisiennes. Ludovic Franceschet, 47 ans, éboueur depuis six ans, montre les coulisses de ce qu'il appelle "un métier de rêve" à ses quelque 300 000 abonnés. Dans de petites vidéos humoristiques, il se met en scène avec, toujours sur la tête, un bob et son roule-sacs pour sensibiliser à la propreté dans l'espace public.

Il s'est lancé dans l'aventure des réseaux sociaux en 2019, après une énième insulte lâchée par un automobiliste, pour rappeler que même s'il est passionné ses conditions de travail sont difficiles : "Vous savez, je me lève avec les doigts engourdis parce qu'on ramasse les déchets à la pince, on tire des bacs de 600 litres, on respire des produits toxiques derrière le camion, c'est limite. On est en train de nous préparer à travailler en déambulateur !"
Un travail par tous les temps où il faut "gérer le stress" face, parfois, à la violence des automobilistes et passants. "La première année, je me suis fait cracher dessus, dit-il. On est en première ligne. Parfois, quand on est ripper, on a les bus qui nous frôlent les oreilles, tout ça, l'État n'en tient pas compte."

Contre la réforme des retraites, un combat "pour l'avenir"

Pendant le mouvement contre la réforme des retraites, il n'a pas manifesté dans les rues "par crainte des violences". Mais il a fait la grève du ramassage des déchets pendant quatre jours. "Il faut savoir qu'en faisant grève, on perd 75 € donc j'ai perdu 300 €. Mais au final, je me suis battu pour l'avenir, pour les autres parce que moi, ma carrière est tellement gâchée que j'ai fait une simulation : je partirai à 68 ans !" affirme-t-il, fataliste. 

À mesure qu'il s'est mobilisé sur les réseaux sociaux, sa notoriété a explosé. "Ce mouvement est devenu populaire, très soutenu par la population, mais il y a aussi le côté négatif. J'ai été menacé de mort, alors que moi j'essaie juste de défendre une cause qui est la propreté en général. Et je me sers des réseaux sociaux pour transmettre ça. Il y a des gens qui me suivent au Canada, en Inde, au Brésil... C'est incroyable quand même !" C'est ce qu'il aime avec les réseaux sociaux : la communauté qui s'est créée autour de lui. Il tient à clarifier : "Tout le monde me dit que j'ai un deuxième salaire avec les réseaux sociaux. Alors pas du tout. 0 €, mon salaire vient de mon balai.  Mais ce qui est bien avec la notoriété, c'est que les gens viennent me voir partout. Je travaille et on fait des selfies, puis on discute aussi de la propreté et c'est ça qui est intéressant. Ils viennent voir non pas Ludovic mais l'éboueur."

"J'ai donné à ce mot, 'éboueur', toute sa beauté, toute son importance." 

Ludovic Franceschet

à franceinfo

Devenir éboueur était "un rêve de gosse" pour ce gamin de Montélimar, né dans un milieu pauvre, dans une famille nombreuse. Avec pudeur il se souvient des moments de son enfance, de sa première prise de conscience de la propreté : "Tout a commencé quand je m'occupais des rosiers de ma maman, je ramassais aussi les mégots de mes frères et sœurs. Je leur demandais de les mettre dans des cendriers car maman ne nous avait pas élevés comme ça ! Vous savez, j'ai été sans domicile fixe quelques années, et les endroits où j'étais, c'était toujours propre."

Cet été, Ludovic Franceschet s'est lancé un défi. Il a quitté les trottoirs de Paris cette semaine pour ramasser le plus de déchets possible le long de la Nationale 7. Son convoi est attendu à Marseille autour du 24 septembre.

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