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Le nouveau Murakami : sobre et fulgurant

il sort aujourd’hui en France, premier tirage 200.000 exemplaires, c’est le tout nouveau roman d’ Haruki Murakami : « L’incolore Tsukuru Tazaki et ses années de pèlerinage », chez Belfond. L’écrivain japonais, star mondiale de la littérature, renoue avec un style épuré.
Article rédigé par Anne Chépeau
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
  (© Belfond)

Un roman dont le titre évoque un rite initiatique à l’envers, comme un fleuve que l’on remonte, c’est aussi un éloge de la lenteur, du silence

Murakami, orfèvre de l’introspection de ses personnages, ne fait pas appel ici au fantastique, il y a bien quelques pages oniriques, dans ces territoires entre rêve et éveil où l’âme s’égare, mais il est sobre, sombre, tendu vers un but, celui de son héros, la paix intérieure.

Tsukuru Tazaki a 36 ans, c’est un ingénieur qui construit des gares, il vit seul, à Tokyo, si l’auteur le nomme "l‘incolore" c’est que contrairement à ses amis de lycée, il est le seul à ne pas avoir dans son patronyme, une couleur. Ils étaient cinq , trois garçons, deux filles, soudés, inséparables, les quatre autres restent à Nagoya, leur ville natale faire leurs études supérieures, lui part à Tokyo, la bande tient encore un an, mais soudain, sans la moindre explication, Tsukuru en est exclu.

Une déchirure, une souffrance immense, qui poussera le jeune homme au bord de l’abîme

Et tout le roman, 16 ans après les faits, c’est le cheminement de cet être à priori vide, austère, asocial, vers ce passé, pour comprendre, pour s’en libérer et vivre, enfin.

Voyage vers le passé, voyage intérieur, après des années à refouler cette douleur, on pense aux travaux du psychiatre Boris Cyrulnik, qui a inventé le concept de résilience, cette capacité qu'ont les enfants à contourner les traumatismes, mais qu'il faut un jour, adulte, affronter. Et Murakami, dans une langue très épurée, suit son personnage solitaire dans Tokyo ville de multitude, dans les gares, métaphore sur les destins croisés, dans un voyage en Finlande pour mener à terme son pèlerinage.

"Les années de pèlerinage" c'est aussi l'ensemble des pièces pour Piano de Franz Liszt dont le "mal du pays" qui rythme le livre. Ce Murakami est par sa sobriété, moins enchanteur que les précédents, mais pas moins addictif, il pénètre littéralement le lecteur, s'y répand, invite à la méditation, au règlement des conflits et oui, comme Tsukuru Tazaki, on aspire avec ce livre à la paix intérieure.

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