"Mommy" : talent ou esbroufe?

Rappelons d'abord que Xavier Dolan n'a que 25 ans, que "Mommy" est déjà son cinquième long métrage, et que forcement il est assez tentant de lui accoler le qualificatif de jeune prodige du cinéma. D'autant qu'il a incontestablement un talent certain pour marquer les esprits , et séduire son public, tant par son discours souvent sentimental (c'est en larmes qu'il avait, à Cannes, remercié la présidente du jury Jane Campion), que par ses films , peuplés de personnages forts et de séquences chocs. Et c'est exactement ce qui se passe encore avec "Mommy".

Comme son titre l'indique, " Mommy " est le portrait d'une mère, une veuve farfelue, en train de dégringoler en bas de l'échelle sociale, avec toujours un juron a la bouche, habillée comme une ado, à la fois excentrique donc, et héroïque parce que bien décidée à offrir le meilleur à son fils. Son fils qui est l'autre personnage central du film, un ado à la fois hyperactif et autodestructeur, affectueux et violent, refusé par tous les centres d'accueil du pays. C'est donc au coeur de cette relation tumultueuse, orageuse, passionnelle, faite de crises, de bagarres, de passion ou de fêtes, que nous embarque le jeune cinéaste.

Mais devant cette débauche d'énergie, le spectateur se retrouve partagé entre le sentiment de voir le film d'un cinéaste de talent et l'impression d'assister aussi à beaucoup de numéros d'esbroufe. Xavier Dolan multiplie les effets, les ralentis, les filtres. Il sature la bande son de tubes signés Céline Dion, Dido ou Lana Del Rey. Les sentiments et les situations sont exacerbés. Le film tourne en surrégime permanent, au risque de gommer l'émotion. Mais Xavier Dolan assume : "c'est drôle parce que je connais tellement de gens de tous les milieux, de toutes les classes sociales, qui sont comme ça, d'une nature exacerbée, et j'ai même l'impression de les calmer parfois au cinéma. C'est peut-être parce qu'on est trop habitué à des personnages dans les tons de pastel. Mais la vie est pleine de folie".