Charlie Hebdo : 10 ans après l’attentat, quel avenir pour la caricature ?
"L'idée d'un dessin de presse, ce n'est pas uniquement de faire rire, c'est de provoquer la discussion, de stimuler la pensée". Et c’est ce à quoi s’attache Julien Sérignac, qui fut le directeur général de Charlie Hebdo entre 2017 et 2022. En ce mardi 7 janvier 2025, qui commémore les 10 ans après l'attentat djihadiste contre le magazine satirique à la suite de la publication de caricatures du prophète Mahomet, l'ancien directeur publie le livre : L'Art menacé du dessin de presse - Comment défendre la caricature dans une société fracturée ? aux éditions de l'Observatoire.
"De moins en moins de titres publient du dessin de presse"
Depuis les attentats, le constat est simple, la place du dessin d'actualité se réduit d'année en année dans les médias "y compris outre-Atlantique", pointe-t-il. "On a suivi la décision du New York Times, il y a quelques années, de ne plus publier de dessin de presse, explique-t-il. En France, on a de moins en moins de titres qui publient du dessin de presse". Et pourtant, selon un sondage de la Fondation Jean-Jaurès, réalisé avec l'Ifop et qui paraît aujourd’hui, "il y a plus de sept Français sur dix qui sont attachés au dessin de presse".
Charlie Hebdo, c'est 20 000 ventes par semaine, 30 000 abonnés, un journal plus connu que lu. Mais au-delà de la presse papier, il faut désormais aussi compter sur les réseaux sociaux et c’est peut-être là que le bât blesse. "Il y a toujours eu un noyau de lecteurs de Charlie Hebdo attachés à lire ce titre, mais il y a beaucoup plus de personnes qui découvrent les dessins ou les articles de Charlie Hebdo à travers le site ou les réseaux sociaux", souligne Julien Sérignac. "Les dessins circulent énormément sur les réseaux sociaux", or selon lui, pour bien comprendre un dessin, il faut en maîtriser les codes. "Il faut d'abord savoir le lire, l'observer, le regarder et comprendre tous les détails. Il faut également comprendre les références auxquelles ce dessin renvoie". Une pédagogie que l’association "Dessinez Créez Liberté" tente d’apporter aux lycéens pour qu’ils comprennent le dessin de presse et ne soient pas perdus "face à un dessin dont on a l'impression qu'il est raciste alors qu'il combat justement le racisme".
Une maison du dessin de presse pour ne pas oublier
Longtemps dans les cartons, l’idée d’une maison du dessin de presse, lancée en 2015 par François Hollande, alors président de la République, devrait enfin voir le jour en 2027. En 2020, Emmanuel Macron avait à son tour pris cet engagement. Un projet qui d’après Julien Sérignac nécessite "du courage politique". "Plus on avance et plus les étapes se concrétisent. Il y a un lieu maintenant qui est défini, il y a un projet autour de ce lieu. 2027 ce n'est pas dans si longtemps", se réjouit-il. Un lieu où, pour lui, les caricatures de Mahomet devraient être exposées : "C'est indispensable, si on ne montre pas l'objet qui a conduit à cet attentat, on passe à côté de la vocation de ce dessin."
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