Le média féministe "Causette" en liquidation judiciaire : "C’est incompréhensible", pour sa directrice
"J’ai l’espoir qu'il y ait quelqu'un qui reprenne Causette, qui reprenne l'équipe et qui a les moyens d'investir", tels sont les mots de Christine Turk, directrice éditoriale et digitale du premier magazine féministe, jeudi 20 juin. Né avant l’ère #MeToo, le magazine avait cessé sa publication papier en octobre 2023, mais son passage au tout digital n’aura pas suffi à sauver Causette. Christine Turk est donc en quête d'un repreneur pour son journal, qui vient d’être placé en liquidation judiciaire sans passer par la case du redressement, et qui a eu pour effet immédiat le licenciement de tous les collaborateurs. Une décision incompréhensible et d’une grande brutalité pour la journaliste, qui explique que la transition de la version papier au profit du 100% numérique s'est pourtant très bien passée : "On a gagné de nouveaux lecteurs et lectrices qui se sont abonnés en payant, et on a gagné en deux mois l'équivalent de ce qu'on avait mis deux ans à gagner en presse papier". Mais voilà, malgré des chiffres rassurants, redresser en huit mois une entreprise qui a perdu de l’argent peut s’avérer mission impossible. "Rembourser les dettes, c'était devenu trop compliqué et on risquait gros" reconnaît-elle.
Le modèle économique de la presse étant complexe, le 100 % digital était un espoir. Avoir beaucoup d'abonnés payant, est "très rare dans le digital" souligne Christine Turk. Elle aurait aimé avoir du temps pour asseoir ce succès, à l’instar de Médiapart, "qui aujourd'hui fonctionne très bien", mais à qui il a "fallu dix ans pour espérer une rentabilité".
Une lueur d’espoir
La liquidation judiciaire actée, Christine Turk ne baisse pas les bras : "Aujourd'hui, on a des contacts avec différentes personnes qui seraient prêtes à reprendre Causette et qui sont en train d'analyser le dossier", assure-t-elle. Une reprise en liquidation étant toujours possible, il faudra attendre le 4 juillet, date limite pour trouver un repreneur qui tienne la route. La directrice se veut confiante. "L'information n'est plus simplement dans les médias traditionnels. Elle se passe sur TikTok, sur Instagram et c'est le chemin que Causette avait pris. On avait transformé toute la rédaction pour qu'elle soit capable d'appréhender ces nouvelles plateformes", explique-t-elle. "Les articles étaient adaptés au digital, avec de la vidéo, avec des posts Instagram. Et on avait un succès incroyable, poursuit-elle, on a fait grossir nos communautés réseaux sociaux de plus 300% et avec des publics qui nous encourageaient". Évoquant le dernier post, "Causette s'arrête", Christine Turk note "qu'il a été diffusé plus de 300 000 fois", preuve qu’un élan de solidarité s’est créée et que les lecteurs sont nombreux à attendre la résurrection de Causette. Elle indique d'ailleurs ce commentaire : "Quand vous recommencez, on sera prêts à vous aider, à vous faire des dons".
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