Édito
Affaire Andy Kerbrat : un député arrêté en train d’acheter de la drogue doit-il démissionner de l’Assemblée ?

Arrêté à Paris en flagrant délit d'achat de drogue, le député insoumis de Loire-Atlantique reconnaît une "addiction" et promet de "suivre un protocole de soins", mais n'entend pas pour autant démissionner.
Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le député LFI de la deuxième circonscription de Loire-Atlantique, Andy Kerbrat, a été interpellé dans le métro parisien alors qu'il achetait une drogue de synthèse. (PRESSE OC?AN-NATHALIE BOURREAU / MAXPPP)

La question de la démission se pose depuis la révélation de l’interpellation en flagrant délit d’un député insoumis, Andy Kerbrat, au moment où il achetait, la nuit, dans le métro parisien, de la drogue à un dealer mineur, une drogue de synthèse dont "les effets sont l’euphorie et la stimulation de la libido". Les faits sont accablants, le député LFI de Loire-Atlantique les a aussitôt reconnus, mardi 22 octobre. Poursuivi pour "usage de stupéfiants", Andy Kerbrat a présenté ses "excuses" à ses électeurs et choisit d’adopter une posture victimaire. Il a confessé des "addictions" et promis de se soigner pour reprendre son "activité parlementaire".  
  

Il n’entend donc pas rendre son mandat. Les insoumis et les écologistes font d’ailleurs corps autour de lui. Les députées Sandrine Rousseau et Sophia Chikirou s’apitoient sur le sort de cet "homme qui beaucoup souffert". À l’inverse, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau invite le député Insoumis à "tirer les conséquences de ses actes", et juge intolérable "de voir un député de la République acheter des drogues de synthèse à un dealer de rue alors que le narco-banditisme s’installe en France". Au fond, cette affaire est un cas d’école en trois dimensions : éthique personnelle, duplicité des élus, et responsabilité politique.
 

Responsabilité politique et devoir d’exemplarité


Démissionner ou pas, le choix relève de la seule conscience d’Andy Kerbrat, rien de ne l’y oblige. Plus gênant, son comportement privé délictuel heurte ses prises de position publiques : il a souvent pourfendu l’action criminelle des dealers et a signé tout récemment une pétition de parlementaires exhortant le gouvernement à agir enfin contre les ravages du Chemsex, la consommation de drogue lors de rapports sexuels. Bon, on a bien connu un ministre du Budget, Jérôme Cahuzac, qui fraudait le fisc et pourchassait les fraudeurs. Reste enfin une certaine idée de la responsabilité politique qui impute aux élus un devoir d’exemplarité.

Dans les démocraties anglo-saxonne ou scandinaves, un député arrêté en train d’acheter de la drogue serait poussé dehors sur le champ. En France, c’est toujours plus complexe. De Patrick Balkany à Adrien Quatennens, ils sont légion les députés condamnés à s’être accrochés à leurs postes jusqu’au bout, au risque d’abîmer un peu plus la crédibilité de la parole politique. Parfois, tout est aussi affaire d’images et d’écho médiatique. On se souvient que l’ancien ministre François de Rugy avait été poussé à la démission pour avoir organisé des dîners jugés dispendieux, mais parfaitement légaux. Les drogues de synthèse sont visiblement plus digestes que le homard.

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