Édito
Fiscalité : Michel Barnier va-t-il lever le "tabou des hausses d'impôts" ?

Après sept années de baisses d'impôts, Michel Barnier a fait sursauter, mercredi, certains de ses interlocuteurs macronistes en évoquant une hausse des prélèvements, au nom d'une situation budgétaire dégradée. Le Premier ministre risque de se priver de soutiens dans sa propre famille politique.
Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Le Premier Ministre, Michel Barnier, est en déplacement dans le département de la Savoie, le 12 septembre 2024. (BERTRAND RIOTORD / MAXPPP)

Le budget 2025 promet d’être très compliqué à boucler et voilà que Matignon commence à réveiller le débat fiscal. Et si Michel Barnier était un homme sans tabous ? Et si le cinquième Premier ministre d’Emmanuel Macron enterrait le tabou originel du macronisme, le refus de toute hausse d’impôts ? Pendant sept ans, Bruno Le Maire a jalousement fait respecter ce précepte inscrit en lettres d’or, tout en haut des Tables de la loi du régime : les impôts, tu n’augmenteras pas ! À peine le locataire de Bercy a-t-il fait son pot de départ que le nouveau chef du gouvernement pourrait bien faire sauter ce verrou. Attention à Matignon, l’impôt, c’est encore un gros mot. On parle de "plus grande justice fiscale", selon les informations recueillies par franceinfo mardi 17 septembre auprès de l'entourage de Michel Barnier et on souligne que rien n’est décidé. L’idée gagne de nouveaux adeptes.

Mercredi, c’est le président de la Banque de France, François Villeroy de Galhau qui s’y convertit dans une interview au Parisien-Aujourd’hui en France. Lui aussi juge venu le temps de "lever le tabou des impôts", car la réduction des dépenses ne suffira pas à rétablir les équilibres financiers. Même position du patron de la Cour des comptes, Pierre Moscovici. En fait, ceux qui font les comptes commencent à se résoudre à l’inéluctable, mais le problème de Michel Barnier, c’est que ceux qui font, ou pourraient faire, sa majorité y restent foncièrement hostiles. La droite LR d’abord, mais aussi le bloc central. Gabriel Attal remet en cause la participation du camp macroniste à un gouvernement qui augmenterait les impôts et il a rendez-vous mercredi avec Michel Barnier pour le lui dire. Ce mercredi matin, Gérald Darmanin répète qu'il est "hors de question" pour les macronistes de participer au gouvernement dans de telles conditions. Quant au RN, il menace de censurer Michel Barnier en cas de hausse d'impôts.

Une ligne rouge politique sous la présidence d'Emmanuel Macron

Sur ce thème, Emmanuel Macron représente un autre gros obstacle à franchir. À force d’ériger un choix économique en ligne rouge politique, le chef de l’État a lié les mains de ses gouvernements successifs. Il aurait du mal à digérer sans broncher un virage fiscal. Alors attention, ces hausses d’impôts éventuelles ne concerneraient que les très hauts revenus, les gros groupes gorgés de dividendes records, les superprofits des énergéticiens ou encore la taxation des rachats d’actions. Mais au total, l’addition aurait quand même du mal à passer pour les soutiens de Michel Barnier. Au vu de la situation calamiteuse des finances publiques, le nouveau Premier ministre a-t-il encore le choix ? On se souvient de la célèbre apostrophe du général De Gaulle à son retour au pouvoir: "Pourquoi voulez-vous qu’à 67 ans, je commence une carrière de dictateur ?" À 73 ans, Michel Barnier pourrait bien commencer une carrière de percepteur.

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