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Édito
Gérald Darmanin compte bien se rendre à Marseille pour voir des policiers mais sous les radars, un choix assumé mais contestable
Ce sera un déplacement en catimini. Sans surprise, l’entourage de Gérald Darmanin n’aime pas le terme. Le ministre de l’Intérieur, "c’est le premier flic de France, normal donc qu’il aille voir les troupes. D’ailleurs, rencontrer des policiers sans caméra sans micro, il le fait plusieurs fois par mois, et parfois toutes les semaines", nous dit-on. Un malaise s’exprime, Gérald Darmanin fait le travail et ce qu’il dit à ses hommes n’a pas à être rendu public.
Faut-il comprendre qu’il ne tient pas les mêmes propos à huis clos et publiquement ? Son cabinet assure que non. Malgré tout, le problème demeure et il prend probablement ses racines dans cette expression : "premier flic de France". Un ministre de l’Intérieur est certes le ministre de la police mais c’est d’abord un ministre de la République.
Le huis clos entretient le sentiment que Gérald Darmanin serait avec les siens, excluant du même coup les autres citoyens. Ceux qui sont dans le contrat social renoncent à une part de leur liberté en échange du maintien de l’ordre public mais doivent garder, en démocratie, au moins un droit de regard sur la manière dont celui-ci est exercé et le droit d'en juger.
Pas de rencontre prévue avec Hedi, qui affirme avoir été victime de violences policières
À Marseille, Gérald Darmanin veut échanger avec des policiers mais il ne prévoit pas de voir Hedi, le jeune homme qui affirme avoir été passé gratuitement à tabac. À Beauveau, on ne semble pas bien comprendre quel serait l’intérêt d’un rendez-vous ou d’un échange. On souligne n’avoir de toute façon pas reçu de demande officielle. Sauf que lundi 31 juillet, Hedi a une nouvelle fois déploré l’absence de soutien de l’État, de la moindre marque de compassion.
Certes, une enquête est en cours. Hedi présente sa version des faits mais le garçon tient un discours parfaitement citoyen : condamnation des "brebis galeuses", soutien à la police, respect des fonctionnaires et de l’institution et foi en la justice. Ce discours est peut-être préparé avec son avocat, un discours qui perdra - peut-être - de sa superbe au fil de l’instruction mais qui jette des ponts, quand le ministre de l’Intérieur choisit délibérément un camp.
Gérald Darmanin choisit de faire corps pour ne pas s’aliéner des policiers dont il a besoin, y compris politiquement. Faire corps au risque de flatter un corporatisme pourtant d’ordinaire si décrié en macronie. Faire corps quand il faudrait faire République, au risque de renforcer la fracture et l’incompréhension entre les Français et leur police.
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