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Édito
Réforme des retraites : le gouvernement a-t-il déjà perdu la bataille de l’opinion ?

Elisabeth Borne présente aujourd’hui la réforme des retraites dans un contexte de forte hostilité. L'édito politique de Renaud Dély.
Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Elisabeth Borne, la Première ministre, à Paris, le 9 décembre 2022. (ALAIN JOCARD / POOL)

Tous les sondages d’opinion convergent : dans leur grande majorité, les Français sont hostiles à la réforme des retraites. Plus encore au report de l’âge légal à 64 ou 65 ans, une mesure qui cristallise l’opposition de près des trois quarts des personnes interrogées. En fait, il n’y a qu’une catégorie d’âge qui soit favorable à la perspective que les Français travaillent plus longtemps, ce sont ceux… qui ne travaillent plus, c’est-à-dire les retraités. 

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Comment expliquer que cette réforme soit aussi impopulaire ? Sans doute parce que l’exécutif a été incapable d’expliquer clairement pourquoi elle est à ses yeux indispensable. Emmanuel Macron avait d’abord expliqué que l’argent récupéré servirait à financer le plan dépendance pour les personnes âgées. Quelques mois plus tard, il s’agissait d’investir dans l’éducation, la transition écologique et l’hôpital.

"Grève par procuration"

Et depuis quelques semaines, le chef de l’Etat brandit les prévisions de déficit du Conseil d’orientation des retraites (Cor) pour répéter qu’il y a urgence à sauver le système par répartition. Résultat : l’exécutif a échoué à convaincre l’opinion et les syndicats, dont la CFDT, de la nécessité de travailler plus longtemps. Un échec d’autant plus prévisible, qu’il y a trois ans, Emmanuel Macron défendait une réforme systémique, la retraite par points, qui ne touchait pas à l’âge légal de départ. D’ordinaire, quand un gouvernement veut convaincre que des efforts sont indispensables, il noircit le tableau, il agite par exemple le spectre de la capitalisation, c’est-à-dire de pensions correctes réservées aux riches. La droite l’avait fait pour les précédentes réformes des retraites, le gouvernement Borne ne l’a pas fait.
 
Or, cette impopularité est un danger pour le gouvernement. Une majorité de l’opinion voit d’un œil plutôt favorable un éventuel mouvement social. S’ils ne se mettent pas eux-mêmes massivement en grève, les Français pourraient faire "grève par procuration", selon l’expression née lors du plan Juppé de 1995, en soutenant l’action des syndicats dans certains secteurs. Et puis, même si le texte finit par être adopter, grâce aux députés LR ou au 49.3, le gouvernement pourrait payer ce bras de fer au fond des urnes lors de prochaines échéances.

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