Frondeurs, Aubry soit qui mal y pense
Martine Aubry c’est un peu l’Arlésienne du PS. Tout le monde en parle, mais on ne la voit jamais. Plus précisément, on ne voit jamais Martine Aubry dans les débats internes au PS dont elle est pourtant l’une des héroïnes. Martine Aubry, c’est la reine secrète des frondeurs. Ces députés sont très critiques sur le président Hollande, et dénigrent encore plus Manuel Valls, soupçonné de dérive droitière malintentionnée. Comme lors de son déplacement à la City de Londres.
En réalité, ce groupe des frondeurs est très disparate.
On y trouve des représentants historiques de l’aile gauche, comme Pascal Cherki ou Gérard Filoche ; des énarques jospino-mitterrandistess comme Christian Paul ou Gaëtan Gorce, de jeunes députés comme Pouria Amirshahi ou Laurent Baumel, ou des anciens hauts fonctionnaires ministériels comme l’ancien directeur de cabinet de Martine Aubry, Jean-Marc Germain.
Le problème de ces frondeurs, c’est qu’ils n’ont pas de leader. Personne ne les fédère. Seule la contestation de la ligne économique du gouvernement les réunit. Et s’ils ne parviennent pas à proposer une politique alternative, ils risquent d’avoir du mal à tenir. C’est la conviction de certains au sein de l’exécutif : les frondeurs sont dans une impasse. Une impasse politique, leur mouvement n’a pas de débouché. Ce qui ne veut pas dire qu’il est sans objectif. Certains frondeurs le confient : ils préparent le prochain congrès, celui qui actera la défaite idéologique du couple Hollande-Valls pour cause d’échec économique. Ils préparent la victoire d’une ligne de gauche. Mais cela ne leur donne toujours pas le nom d’un champion, ou d’une championne.
Montebourg ou Aubry à la tête des frondeurs ?
Arnaud Montebourg voudrait bien, mais les frondeurs beaucoup moins. Lesquels voudraient bien Martine Aubry, mais elle-même ne sait pas bien. L’ancien première secrétaire, battue à la primaire par François Hollande, a refusé d’entrer au gouvernement. Elle pouvait prétendre à Matignon. Depuis deux ans, sa capacité à incarner une autre politique socialiste a cru en même temps que son silence. Le problème pour Martine Aubry, c’est de sortir de ce silence, sans paraître déloyale, sans donner le sentiment de décocher un croche pied vengeur à des rivaux personnels. La réforme territoriale et la réduction de la dotation de l’Etat pour les collectivités locales ont un peu délié sa langue et beaucoup alimenté sa colère. D’où quelques petites phrases en forme de coups de griffe, et un agenda surchargé le jour de la venue du Premier ministre à Lille.
Depuis Martine Aubry a retrouvé un ton aimable pour accueillir Manuel Valls au nom d’une "évidence absolue". Dimanche dernier, Arnaud Montebourg, aussi frondeur que leader, s’impatientait en bombant le torse : "il est temps qu’elle nous dise ce qu’elle a à nous dire" . Pour une fois Arnaud Montebourg est d’accord avec ce qui se murmure à l’Élysée : la réelle détermination de Martine Aubry demeure un mystère.
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