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Édito
Utilisation de l'article 49.3 : des motions de censure pour rien, ou presque
Elisabeth Borne a déclenché mercredi 19 octobre l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter sans vote la première partie du budget 2023, celle qui concerne les recettes.
C'était une décision attendue, qui clôt donc le premier acte de la discussion budgétaire. Aucun suspense : c’était annoncé, et inévitable puisque l’exécutif était régulièrement mis en minorité dans l’hémicycle. Place maintenant au deuxième acte, lui aussi connu d’avance : la motion de censure. Ou plutôt les motions de censure. Deux vont être déposées, l’une de la Nupes et l’autre du RN.
Pour être adoptée, la motion de censure doit recueillir la majorité absolue, soit 289 voix, c’est-à-dire le total Nupes + RN + LR. La gauche n’a que 151 députés, l’extrême droite 89, et aucun des deux camps ne votera pour l’autre. Le gouvernement ne tombera pas. Fin du suspense.
Une motion de censure est d’abord une tribune
Cela va permettre aux oppositions de dénoncer un "passage en force", un "déni de démocratie", bref de se victimiser. Elles ont déjà commencé hier dans l’hémicycle. Et puis, pour les quatre formations qui composent la Nupes – Insoumis, PS, Verts et PCF – déposer une motion de censure commune permet de ressouder les rangs. Au moins pour un temps. Et la gauche en a bien besoin au vu de sa rentrée calamiteuse et des divisions qui la rongent, en particulier avec les affaires Quatennens et Bayou.
Enfin, c’est un moyen pour l’opposition de gauche de se distinguer de celle du RN. Il y a dix jours, certains insoumis comme le fidèle mélenchoniste Manuel Bompard n’excluaient pas de mêler leurs voix à celles de l’extrême droite. Ils y ont renoncé et la Nupes va montrer que sur le fond ses critiques n’ont rien à voir avec celles du RN, et qu’elle est bien la première opposition au macronisme puisque son texte va recueillir davantage de suffrages que celui des lepénistes. Mais sans aucune chance d’être adoptée…
Pas de majorité alternative
C'est l’inconvénient de la manoeuvre. Depuis quatre mois, Jean-Luc Mélenchon répète qu’il a gagné le premier tour des législatives, et qu’Emmanuel Macron n’a pas de majorité à l’Assemblée. Sauf que cette comédie en deux actes, 49.3 puis motion de censure, va confirmer deux choses que la Nupes a encore du mal à s’avouer : elle a nettement perdu les législatives, et si le gouvernement n’a pas de majorité absolue, la gauche est encore loin, très loin, de pouvoir constituer une majorité alternative.
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