Avec la réforme du RSA, "au bout de six mois, on est à 42% de retour à l'emploi", se félicite le directeur général de France Travail
Il y avait au troisième trimestre 3 021 600 demandeurs d'emploi inscrits à France Travail en catégorie A en France, hors Mayotte. "Catégorie A", ce sont les personnes qui n'ont eu aucune activité. Ce chiffre n'augmente quasiment pas, puisque sur un trimestre cela représente une hausse de 0,2%, et de 0,1% sur un an.
franceinfo : Le chiffre des demandeurs d'emploi n'augmente pas beaucoup, mais ne baisse pas non plus.
Thibaut Guilluy : Non, effectivement, ça ne baisse pas non plus. Il y a un ralentissement, clairement. Et, fin 2023, tous les prévisionnistes nous annonçaient à 7,9% et même certains, les plus pessimistes, à 8% de chômage. Donc on a su quand même contenir sur l'année la hausse du chômage.
Est-ce qu'aujourd'hui la conjoncture est plus favorable au recrutement pour les demandeurs d'emploi ?
Depuis ces dernières années, le taux de chômage a quand même assez fortement baissé. On est passé d'un peu plus de 10% à pas loin de 7%. Donc cela rétablit un peu l'équilibre entre les salariés et les candidats. J'étais récemment à Royan, où on innove à France Travail avec ce qu'on appelle des job-datings inversés, où ce sont les patrons et les patronnes qui viennent plaider, présenter leur entreprise aux demandeurs d'emploi, pour créer la rencontre.
Si on regarde dans le détail, cela augmente très légèrement pour les hommes, c'est stable pour les femmes. Pour les 50 ans et plus, on a un augmentation du nombre de demandeurs d'emploi de 0,8%. On arrive pas à faire bouger ce levier de l'emploi des seniors ?
Ce n'est pas ce que je dirais parce que le taux d'emploi des séniors n'a jamais été aussi élevé, on a tendance à l'oublier. Il progresse. Cela dit, on est en retard par rapport à la classe européenne et donc il faut qu'on continue d'investir clairement dans l'emploi des seniors. C'est ce que nous faisons à France Travail. On doit accompagner beaucoup mieux des parcours de reconversion, donc on investit aussi assez fortement dans la formation. Je pense à un programme qu'on a lancé : "Atout senior" par exemple, qui va toucher 1 000 demandeurs d'emploi seniors sur l'Ile-de-France en test. Et puis il faut aussi mobiliser les entreprises pour changer quand même aussi un petit peu le mindset, parce que de temps en temps on a des recrutements stéréotypés.
On est en plein examen du budget. À France Travail, 500 suppressions de poste sont prévues. Avec ces moyens humains au moins, pouvez-vous arriver à tenir l'objectif d'Emmanuel Macron sur le plein emploi, donc un taux de chômage à 5% à la fin du quinquennat ?
Effectivement, pour atteindre le plein emploi (et c'est tout le sens de la création de France Travail), il faut qu'on aille au devant de ceux qui étaient éloignés de l'emploi. Je pense notamment aux bénéficiaires du RSA. À partir du 1ᵉʳ janvier 2025, c'est plus d'un million d'entre eux qui vont être inscrits à France Travail. Et je pense aussi aux jeunes : "Avenir professionnel", c'est un dispositif qu'on est en train de faire monter en puissance dans les lycées professionnels pour aussi accompagner ces jeunes là. Il y a aussi les personnes en situation de handicap. Nous avons ces défis.
"Nous avons besoin de moyens, nous avons besoin de conseillers, parce qu'accompagner vers l'emploi, c'est d'abord du personnel, c'est d'abord de l'humain, c'est d'abord de la relation."
Thibaut Guilluy, directeur général de France Travailà franceinfo
Je passe mon temps à sensibiliser les responsables politiques pour qu'effectivement les emplois soient préservés parce que ce sont des conseillers, qui permettent d'accompagner et d'accélérer le retour à l'emploi des personnes et de répondre aux besoins des entreprises. Et c'est en cela que cela contribue aussi à la réduction des déficits publics. L'emploi, l'accès au travail du plus grand nombre, c'est la clé pour cela. Et France Travail est l'outil pour le plein emploi. Notre dotation financière, en revanche,est maintenue par le gouvernement. Elle est d'un milliard 200 millions d'euros.
La réforme du RSA va être généralisée au 1ᵉʳ janvier. Il y a une expérimentation en cours avec des contrats d'engagement à 15 heures d'activité hebdomadaires, avec possibilité de sanction en cas de non-respect. Cela inquiétait notamment des associations. Vous avez pu tirer un premier bilan de cette expérimentation ?
Ce qui est sûr, c'est que ça fait très longtemps qu'on a mis les bénéficiaires du RSA sur le bord de la route. Plus d'un sur deux restent plus de quatre ans au RSA, avec très peu de contacts. Et donc nous, avec les départements de France et le soutien de l'Etat, on a décidé de proposer un accompagnement intensif : minimum 15 heures d'activité par semaine. Près de 55 000 bénéficiaires du RSA ont bénéficié de cet accompagnement, à date. Parce qu'on apprend dans chaque territoire comment apporter le meilleur accompagnement à chacune de ces personnes. Et 92% sont très satisfaits de cet accompagnement.
Les résultats sont là puisqu'au bout de six mois, on est à 42% de retour à l'emploi. Au bout de douze mois, on enregistre même des taux de retour à l'emploi de 54%. Et cette sortie durable du RSA, c'est bon pour les personnes qui sortent de l'exclusion, c'est bon parce qu'on apporte des réponses très concrètes aussi aux entreprises qui ont des difficultés à recruter, et cela fait moins d'allocations à financer et plus de cotisants pour soutenir notre modèle social.
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