Emploi des seniors : "L'immersion et la formation, ça fonctionne", affirme le directeur général de France Travail
810 000 personnes de plus de 50 ans, sans aucune activité, sont inscrites à France Travail. Et seuls 57% des 55-64 ans ont un emploi aujourd'hui. Paul Bazin, directeur général adjoint de France Travail, l'affirme, mercredi 7 février, leur objectif est "d'accompagner chacun et de faire le diagnostic de sa situation".
franceinfo : Comment pouvez-vous, à France Travail, améliorer cette situation ?
Paul Bazin : On doit faire plus et mieux pour l'emploi des seniors, c'est l'objectif de France Travail. L'objectif, c'est de proposer à chaque demandeur d'emploi de plus de 50 ans un parcours adapté à sa situation. Derrière le mot senior, il y a des réalités très différentes, individuelles. On a des demandeurs d'emploi qui sont en reconversion forcée parce que leur secteur d'activité est en déclin. On en a d'autres qui veulent se reconvertir et mobiliser leurs compétences sur d'autres métiers. On a aussi des personnes qui restent longtemps au chômage et qui ont des difficultés sociales qui se créent, et là aussi, avec nos partenaires, on doit accompagner chacun de ces besoins.
Le chômage a baissé l'an dernier de plus de 2%. Cela signifie-t-il que ces personnes ont retrouvé un travail ou qu'elles ont renoncé à en chercher un ?
Ça signifie qu'une grande partie d'entre elles a retrouvé un travail. L'objectif de France Travail, c'est vraiment d'aller chercher l'ensemble des personnes en recherche d'emploi. Au 1er janvier 2025, ils seront tous inscrits à France Travail pour leur proposer à chacun le parcours d'accompagnement qui correspond à leur situation et qui correspond à leur projet professionnel.
Mais que pouvez-vous améliorer par rapport à Pôle Emploi ?
Avant, chaque acteur avait un morceau de la solution.
"Désormais, avec France Travail, avec tous nos partenaires, on va proposer des parcours qui vont mobiliser les solutions de tous les acteurs."
Paul Bazinsur franceinfo
Je vous donne un exemple : ce qui marche très bien pour l'insertion dans l'emploi des demandeurs d'emploi seniors, c'est l'immersion professionnelle. On va dans une entreprise un jour, une semaine, un mois, on observe le travail sur le poste de travail, l'employeur observe le demandeur d'emploi et dans sept cas sur dix, il y a un recrutement à la clé. L'immersion, ça fonctionne, la formation, ça fonctionne aussi.
Là, vous parlez de reconversion ?
On peut parler de reconversion, absolument. Une bonne partie des demandeurs d'emploi seniors sont des personnes qui ont exercé un métier, parfois toute leur vie, et qui ont perdu cet emploi-là. Elles ont besoin de se reconvertir. Mais pour ça, il faut valoriser tout ce qu'elles ont acquis comme compétences et notamment des savoirs-être professionnels qui sont très recherchés par les entreprises aujourd'hui.
"Les seniors ont beaucoup de compétences à valoriser et on peut les aider à développer leurs compétences avec de la formation, notamment en situation de travail."
Paul Bazinsur franceinfo
Les partenaires sociaux sont en pleine négociation sur l'emploi des seniors. Ils ont jusqu'à fin mars pour se mettre d'accord. Que faut-il mettre en place en priorité ?
Je vais laisser les partenaires sociaux négocier autour de ces règles d'indemnisation. Le travail de nos 25 000 conseillers dans les agences, c'est d'accompagner chacun, de faire le diagnostic de sa situation : quels sont ses besoins, quel est son projet professionnel ? Et ensuite lui trouver des solutions pour réaliser ce projet à travers la formation, à travers le règlement de ces difficultés sociales, mais aussi des problèmes de mobilité, de santé pour certains demandeurs d'emploi seniors. Et nous avons des solutions pour ça, elles sont trop peu mobilisées. Il faut qu'on travaille mieux avec nos partenaires pour pouvoir proposer à chacun la solution.
Avez-vous beaucoup de seniors qui sont au chômage depuis longtemps ?
Oui, les demandeurs d'emploi seniors restent un peu plus longtemps au chômage que les demandeurs d'emploi plus jeunes, c'est un fait. Donc oui, on a une partie des demandeurs d'emploi qui sont au chômage depuis un certain temps. Et pour ceux-là en particulier, on mène des actions de remobilisation, c'est-à-dire qu'on interroge les raisons pour lesquelles ils ont pu s'enfermer dans le chômage. Il peut y avoir des freins sociaux qui ont été créés, il peut y avoir des orientations vers des métiers où, en fait, leur profil ne correspondait pas à la réalité du marché du travail et on les accompagne dans des reconversions et dans le règlement de ces difficultés sociales, tout ça avec nos partenaires. On a tous un morceau de la solution et avec France Travail, on propose des parcours adaptés à chacun.
Avec des moyens supplémentaires ?
Oui, des moyens importants, humains et financiers, ont été confiés à France Travail. L'État discute avec les Conseils régionaux pour augmenter les formations et parmi les publics cibles, des formations pour retrouver un emploi, il y a justement les demandeurs d'emploi seniors.
Accompagner les reconversions, mettre en place des entretiens tout au long de la carrière, au sein même des entreprises, cela peut-il être une solution pour maintenir les seniors en emploi ?
Oui, absolument.
"Pour gagner la bataille de l'emploi des seniors, on a absolument besoin que les employeurs réfléchissent à la manière de garder leurs salariés en emploi."
Paul Bazinsur franceinfo
Toutes les mesures que l'on peut mettre en place dans les entreprises pour qu'ils conservent les salariés font partie de la solution. Ensuite, si malheureusement ce n'est pas possible, c'est France Travail et à ces partenaires de prendre le relais et de faire en sorte d'accompagner la reconversion professionnelle des demandeurs d'emploi, là encore, par la formation en particulier.
Parmi les pistes qui sont avancées par le patronat, il y a celle d'inciter les patrons à conserver les salariés les plus âgés fiscalement. Qu'en pensez-vous ?
Je ne me prononce pas sur les discussions, encore une fois, qui peut avoir lieu entre l'État et les partenaires sociaux. C'est à eux de décider des règles, ce sera le rôle de France Travail de les mettre en œuvre. Là encore, notre travail, c'est d'aller vers les entreprises pour les accompagner aussi dans leur politique de ressources humaines. On va tester des choses avec France Travail dans ce domaine, avec nos partenaires pour devenir le meilleur allié RH de toutes les entreprises et les aider à travailler sur leur gestion des emplois et des compétences, par exemple, pour éviter le chômage. Et lorsque le chômage se profile, accompagner tout de suite la personne pour qu'elle ne perde pas de temps, qu'elle ne s'enferme pas dans le chômage et qu'on retrouve très vite une solution.
Il ne s'agit donc pas de mener une guerre aux seniors, comme l'a dit Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT aujourd'hui ?
Non, il s'agit de mener la bataille de l'emploi. S'il y a une guerre à mener, s'il y a un combat à mener, c'est d'aller chercher des solutions pour chaque demandeur d'emploi en fonction de sa situation, et des candidats pour chaque entreprise qui a besoin de recruter.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.