Finances : "Il y a des nouveaux investisseurs, beaucoup sont jeunes et s'intéressent aux crypto-actifs", selon l'Autorité des marchés financiers

L'Autorité des marchés financiers a vu arriver "à peu près un million" de nouveaux investisseurs depuis 2020. Et "56% ont moins de 35 ans", assure sa présidente Marie-Anne Barbat-Layani.
Article rédigé par Camille Revel
Radio France
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Temps de lecture : 6min
Marie-Anne Barbat-Layani le 29 avril 2024. (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

L'Autorité des marchés financiers (AMF) est une autorité publique indépendante chargée de veiller à la protection de l'épargne investie en produits financiers, à l'information des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés. Elle publie, lundi 29 avril, son tableau de bord trimestriel des investisseurs. Il s'agit d'un état des lieux des particuliers qui ont réalisé au moins une transaction sur un instrument financier.

Marie-Anne Barbat-Layani, présidente de l'Autorité des marchés financiers (AMF), constate qu'il y a un phénomène de "jeunesse et de rajeunissement de l'investissement". Ces investisseurs "sont crypto-philes, il y en a plus de la moitié, qui ont investi en crypto", explique-t-elle. La présidente de l'AMF les incite à la prudence, car ces investisseurs "surestiment un peu leurs compétences en matière financière. Donc, ils ont tendance à avoir un peu trop confiance dans leurs capacités à bien évaluer ce qu'il faut qu'ils choisissent comme investissement", selon elle.

Franceinfo : Que doit-on retenir du dernier tableau de bord des investisseurs de l'AMF ?

Marie-Anne Barbat-Layani : On peut retenir plusieurs choses. D'abord, les particuliers sont actifs. Il y a 737 000 Français qui ont fait des transactions sur le premier trimestre de l'année 2024, c'est à peu près stable. Ils rajeunissent et il y a de nouveaux investisseurs.

"59 000 personnes, qui n'avaient jamais investi sur les marchés financiers, ont investi au premier trimestre 2024."

Marie-Anne Barbat-Layani

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Donc c'est intéressant, ça prouve qu'il y a un regain d'intérêt. Et peut-être, le troisième enseignement, c'est la montée en puissance d'un instrument financier qu'on appelle les fonds indiciels cotés, les ETF. Et pour la première fois, au cours de ce trimestre, il y a eu plus d'un million de transactions sur ce type d'instrument. Donc c'est intéressant à voir parce qu'on voit que c'est un nouvel instrument qui attire.

Quelle proportion de ces nouveaux investisseurs, ou des investisseurs tout court, est jeune ? Qu'appelez-vous jeunes investisseurs ?

D'abord, ce sont de nouveaux investisseurs. Donc ça, des nouveaux investisseurs, on en a vu arriver. Ce tableau de bord, on le suit tous les trimestres, on en a vu arriver à peu près un million depuis 2020. Et ces investisseurs, il y en a 56% qui ont moins de 35 ans. Donc c'est pour ça que je parle de jeunesse et de rajeunissement de l'investissement.

"Les gens qui investissent dans ces fameux ETF, ils sont plus jeunes, donc il y a un rajeunissement des investisseurs."

Marie-Anne Barbat-Layani

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Et d'ailleurs, ça a attiré notre attention parce que, comme vous l'avez dit, notre première mission, c'est la protection des épargnants. On fait beaucoup de choses là-dessus. Et la première chose qu'on a voulu faire, constatant effectivement l'arrivée de ces nouveaux investisseurs, c'est de mieux les connaître. Et donc on a fait réaliser, par l'OCDE, une étude sur les nouveaux investisseurs pour mieux comprendre qui ils étaient et mieux les connaître. Et à terme aussi, ça sera la deuxième partie des travaux, avoir une pédagogie financière qui soit plus adaptée à ces nouveaux investisseurs.

Que savez-vous de ces nouveaux jeunes investisseurs ?

Ils sont jeunes, effectivement, mais il y a aussi des moins jeunes. Il y a des nouveaux investisseurs, beaucoup sont jeunes, mais pas que. Et, souvent, ils s'intéressent beaucoup aux crypto-actifs - on parle plutôt de crypto-actifs que de cryptomonnaies. Donc ils sont crypto-philes. C'est-à-dire qu'effectivement, plus de la moitié de ces nouveaux investisseurs ont investi en crypto. Au niveau de la population générale, c'est déjà un phénomène qui est très tangible.

"Aujourd'hui, on a plus de Français qui détiennent en direct des crypto-actifs que des actions cotées."

Marie-Anne Barbat-Layani

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Donc, vous voyez que c'est un phénomène qui est assez massif. L'autre enseignement qui est important, c'est qu'ils se renseignent beaucoup, mais c'est assez normal, sur les réseaux sociaux. Et le troisième enseignement, qui attire un peu notre attention, c'est qu'ils surestiment un peu leurs compétences en matière financière. Donc ils ont tendance à avoir peut-être un petit peu trop confiance dans leur capacité à bien évaluer ce qu'il faut qu'ils choisissent comme investissement et à bien aller au-devant de ce qui est bien pour eux.

Comment l'AMF peut conseiller, orienter et aider à éviter de se faire arnaquer ?

La première chose qu'on peut faire, c'est de rappeler quelques conseils importants. Il n'y a pas de rendement sans risque. Donc si vous avez une publicité mirifique qui vous explique que vous allez devenir milliardaire sans prendre le moindre risque, attention, attention ! Ensuite, il y a beaucoup d'arnaques. Donc première chose à faire quand un intermédiaire financier s'adresse à vous, c'est d'essayer de voir s'il n'est pas sur les listes noires de l'AMF, qu'on peut trouver en ligne sur notre site. Parce qu'effectivement il y a beaucoup d'arnaques, il y a aussi beaucoup d'usurpations d'identité, mais ça, ce n'est pas spécifique au monde financier.

"15% des Français disent avoir été victime d'une arnaque financière. Et chez ces fameux plus jeunes, les moins de 35 ans, c'est 35%."

franceinfo

Cela veut dire qu'aujourd'hui la problématique des arnaques financières est massive et que donc nous devons effectivement, nous, beaucoup monter en puissance pour communiquer davantage auprès de ces investisseurs, leur mettre quelques fards ou quelques "warning" ou quelques feux rouges pour qu'ils aient les bons réflexes. Parce qu'après, on ne peut pas mettre un collaborateur de l'AMF derrière chacun des investisseurs, évidemment. Donc il faut vraiment qu'on arrive à avoir une pédagogie financière qui soit très ciblée et qui leur permette d'avoir les bons réflexes.

Travaillez-vous sur la question des influenceurs ?

Bien sûr, on y a beaucoup travaillé et vous avez vu que le gouvernement a fait l'année dernière tout un travail sur les investisseurs qui a donné lieu à une loi d'ailleurs. La question des influenceurs financiers, que nous appelons les "fin influenceurs", elle est très importante parce que ça fait partie des canaux d'information qu'utilisent beaucoup les nouveaux investisseurs, et notamment les plus jeunes d'entre eux. Et donc là, on a travaillé avec l'Autorité de régulation de la publicité pour faire un certificat de l'influenceur responsable en matière financière, pour qu'effectivement il y a des principes de base qui soient bien respectés par les influenceurs lorsqu'ils vont intervenir dans un secteur qui est très réglementé et pour de bonnes raisons. Donc, il ne faut pas y aller sans savoir qu'il y a des règles qui s'appliquent. On prend le temps de sa décision. On ne se précipite pas. Si quelqu'un vous met la pression pour prendre une décision très vite, en vous faisant miroiter des rendements fabuleux, méfiez vous, faites une pause, prenez le temps de réfléchir.

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