Cet article date de plus d'un an.

"Je veux baisser les cotisations pour réduire le coût du travail tout en augmentant les salaires nets des gens", assure Pierre Gattaz, ancien président du Medef

Pierre Gattaz, l'ancien président du Medef, était l'invité éco de franceinfo, lundi 2 octobre, à l'occasion de la parution de son autobiographie.
Article rédigé par Isabelle Raymond
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
Pierre Gattaz, l'ancien patron du Medef publie son autobiographie. (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

L'industriel français, Pierre Gattaz, qui a dirigé le Medef, le Mouvement des entreprises de France, le principal syndicat patronal, de 2013 à 2018, publie son autobiographie Enthousiasmez-vous ! Ce que la vie m’a appris… et que je voudrais partager avec vous. Elle sera disponible le 4 octobre 2023 aux éditions du Rocher.

franceinfo : Plus d'un million de créations d'entreprises en France l'an dernier, dont plus de la moitié d'autoentrepreneurs, c'est un record, c'est enthousiasmant pour vous ?

Oui, en fait, l'entrepreneuriat, c'est la liberté, c'est d'être son propre patron. Et je trouve ça formidable que, d'abord, une majorité de jeunes veuillent être entrepreneurs et que ça se passe en France. Ça se passe depuis pas mal de temps. Une dizaine d'années peut être. Et ça, c'est très important.

Aujourd'hui, est-ce que vous saluez la baisse de la fiscalité sur les entreprises qui a été engagée par Emmanuel Macron : baisse de l'impôt sur les sociétés, baisse des impôts de production également ?

Oui, et je rends d'ailleurs hommage dans ce livre à Manuel Valls qui a fait des réformes assez impopulaires à l'époque sur la baisse de la fiscalité puisque le taux d'impôt sur les sociétés est tombé de 33% à 25%. Il y a eu des réformes du code du travail, de simplification avec les réformes El Khomri. Emmanuel Macron a continué à simplifier et à baisser la fiscalité, notamment la suppression de l'ISF. Et tout ça a permis de redonner le moral aux entrepreneurs, qu'ils aient moins peur d'embaucher. Ça a changé l'image internationale de la France aussi. Moi, je sais qu'en 2013-2014, il y avait quand même l'arrivée de François Hollande qui était assez mal vue dans les milieux économiques, avec un certain nombre de postulats un peu difficiles, de cadeaux aux entreprises, et cetera. Et progressivement, je rends hommage au fait que l'entreprise n'est pas politique, c'est un bien commun si elle permet de créer de l'emploi, de créer de la vie, du travail. Et c'est ça qui est important depuis dix ans. Je salue le travail qui a été fait et qui a permis de baisser le chômage de 10%.

Après, il ne faut pas retourner sur les vieilles lunes de la fiscalité. On est encore à un niveau de fiscalité qui est plus élevé que tous les pays européens. Pourquoi ? Parce que nous avons encore des dépenses publiques de 57% du PIB. Et j'explique dans ce livre qu'il faut appliquer des méthodes de management et de RH modernes que nous mettons en œuvre dans nos entreprises. Le fonctionnaire moyen est un type très engagé, comme nos salariés, il faut lui faire confiance. Il a plein d'idées, plein de solutions. Quand je vois des infirmières qui courent dans tous les sens dans les hôpitaux, on leur demande jamais : est-ce que vous avez des idées pour régler votre problème ?

C'est ce que vous dites dans votre livre, quand la fonction publique prend des méthodes RH qui viennent du privé, elle prend plutôt le mauvais, c'est une sorte de caricature de l'entreprise ?

Mais exactement, on prend que le mauvais côté qui est de dire "profits, profits, profits, tenez votre budget et les dépenses on les baisse". Ça ne marche pas comme ça dans les entreprises, vous embarquez vos salariés. Surtout les boîtes familiales que je connais bien, les ressources fondamentales, ce sont les ressources humaines. On veut aller loin, on veut rester dix ans, 20 ans, 30 ans. Donc on fait attention aux équipes et en faisant attention aux équipes, on leur demande toute la journée ou toutes les semaines : dites-moi les problèmes que vous voyez et on va essayer de trouver des solutions avec vous. Et souvent ils ont des solutions, à force de les impliquer dans un processus et une vision enthousiasmante d'un futur qui n'existe pas encore en France. Ça n'existe pas dans la fonction publique malheureusement. Et moi je trouve qu'il y aurait sans doute cette vision qu'il faut pousser dans la fonction publique et un management moderne qui permettrait d'associer tout le monde à un objectif et d'en faire profiter les fonctionnaires eux-mêmes. Nous, on a des primes, de l'intéressement, de la participation et on récompense et je trouve que tout ça n'existe pas dans la fonction publique malheureusement.

On se souvient de votre pin's "un million d'emplois". Bruno Le Maire dit que deux millions d'emplois ont été créés depuis 2017. Comment est-ce qu'on atteint le plein-emploi ? Est-ce que ça suppose notamment de durcir encore les règles d'accès à l'Assurance chômage ?

Moi, je crois que la France est au milieu du gué. Il y a eu des choses formidables qui ont été faites et c'est pour ça que je suis enthousiaste et optimiste sur la France. On est passé de 10% de chômage à 7%. Je pense que vraiment on peut arriver à 5%. Mais il faut continuer d'avoir confiance dans les entreprises. Il faut continuer de faire des réformes importantes qui consistent à travailler plus pour gagner plus. Je suis désolé de reprendre un vieux slogan, mais le travail, c'est la dignité humaine, c'est la liberté. Et en France, on a trop souvent opposé l'entreprise et l'humain. Et moi j'essaye depuis, disons 15-20 ans, de réconcilier l'entreprise et l'humain. Nos salariés, dans la plupart des boîtes, adorent leur travail.

Il y a une conférence sociale sur les salaires qui arrive mi-octobre, est-ce que ça suppose aussi d'augmenter les salaires et notamment les bas salaires ?

Ce que je propose dans mon livre, c'est d'abord de baisser les dépenses publiques par des méthodes de management modernes et puis de faire le tri. Ce que je propose, c'est que quand on donne 100 euros net à quelqu'un dans sa poche, ça coûte 200 euros à l'entreprise. Il faut réduire ce matelas de charges sociales et patronales, en redistribuant les trois quarts des bénéfices aux salariés. C’est-à-dire qu'en fait, j'adorerais que les partenaires sociaux se mettent autour d'une table pour dire comment on peut réduire ces charges sociales et patronales. On touche à la retraite, certes, il faut continuer. L'Assurance chômage, certes, qui a déjà été modifiée, mais il y a toute la partie maladie, santé, prévoyance. Je veux baisser les cotisations pour pouvoir baisser le coût du travail tout en augmentant les salaires nets des gens.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.