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L'interview éco. Jean-Paul Bailly : "La France est un pays réformable si on est capable de formuler un projet, une vision"

Jean-Paul Bailly, l’ancien patron de la Ratp et de La Poste, était l'invité d'Emmanuel Cugny mercredi 19 octobre sur franceinfo. Il revient sur les méthodes qu'il a employées pour faire évoluer les deux grandes entreprises publiques.

Article rédigé par franceinfo, Emmanuel Cugny
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Jean-Paul Bailly, l’ancien PDG de la Ratp et de La Poste, sur franceinfo le 19 octobre 2016 (RADIO FRANCE / CAPTURE D'ÉCRAN)

Le sujet de la réforme est au cœur de la campagne pour l’élection présidentielle de 2017. Dans un livre intitulé Réformez ! Par le dialogue et la confiance (Descartes et Compagnie), paru fin septembre, Jean-Paul Bailly, l’ancien patron de la RATP et de La Poste, revient sur les méthodes qu’il a employées pour réformer les deux grandes entreprises publiques. Il était l'invité de franceinfo mercredi 19 octobre.

Emmanuel Cugny : La France est-elle un pays réformable ?

Jean-Paul Bailly : Oui, c'est un pays réformable. Je pense que les Français attendent du changement et des réformes. Je me fonde pour ça sur l'expérience de vingt ans à la tête de deux grandes entreprises que j'ai réformées : la RATP et La Poste. 

Je pense que la France est réformable, si on est capable de formuler un projet, une ambition, une vision pour le pays, avant de passer à des catalogues de mesures. Parce que toute réforme est possible à condition que les gens en comprennent le sens, le pourquoi, le comment et aussi ce qu'ils vont devenir dans cette réforme.

Mais il faudra une transformation profonde. La mise en œuvre des réformes ne peut pas être strictement centralisée. Il faut s'appuyer sur la responsabilité des hommes et des femmes du terrain. Il faut aussi une capacité d'anticipation et bien gérer le temps. Le temps est une dimension essentielle de la réforme. Il y a la durée, l'anticipation, choisir le bon moment. Il y a la possibilité d'aller vite ou lentement, il y a le bon rythme, le bon ordre des choses. L'ordre dans lequel arrivent les lois ne fait aucun sens, alors que l'ordre devrait permettre la construction d'un projet et qu'on voit comment chaque loi est une brique qu'on apporte à la construction de ce projet.

Cela vaut aussi pour le dialogue social ?

Le dialogue social ne peut pas être centralisé. À la RATP, l'un des grands moments a été la manière dont on a réussi à mettre en service une ligne de métro sans conducteur et sans grève ! Ce qui est évident ne va pas de soi dans une entreprise extrêmement syndicalisée. Le secret a été l'anticipation et le dialogue. Nous avons commencé les négociations trois ans avant la mise en service et les avons finies un an avant la mise en service, le temps de faire les formations, l'organisation, etc... Avec un dialogue au plus près du terrain. Les syndicats m'ont dit "Pour quelque chose d'aussi important, ça va être le ministre qui va négocier ?". J'avais dit "Non, ce sera le futur patron de la ligne 14. Il connaît les syndicats. Il a leur confiance, il a la mienne. Et il connaît les sujets et il sait l'organisation dont il a besoin".

Etes-vous allé jusqu'au bout de la réforme que vous souhaitiez à la RATP et à La Poste ? Avez-vous des regrets ?

Je pense qu'on a fait beaucoup. On a aussi mis en place l'alarme sociale, qui a fait pratiquement disparaître la conflictualité et aussi aidé l'entreprise à devenir un vrai acteur international dans le domaine des opérations, puisqu'ils font plus d'un milliard de chiffre d'affaires en dehors de France pour la RATP. 

J'ai un regret, c'est de ne pas avoir pu finaliser l'ensemble des réformes de La Poste, après le changement de statut, par la mise en place de l'actionnariat salarié. C'eût été une révolution [pour une entreprise publique] et ma conviction de toujours a été d'allier l'économique et le social. 

Emmanuel Macron préface votre livre en écrivant "Notre plus grand défi est de réformer notre manière de réformer". Pour réformer, faut-il démissionner ?

Je suis tout à fait d'accord avec cette préface. Le vrai sujet, c'est de savoir si on peut réformer quand on est au gouvernement. Je pense que oui, sous réserve qu'on passe le temps et l'énergie nécessaires à définir le sujet et le pourquoi. Et qu'on ne passe pas tout de suite au quoi.

Visionnez l'intégralité de l'interview de Jean-Paul Bailly au micro d'Emmanuel Cugny


Jean-Paul Bailly (ex-président RATP et La Poste... par franceinfo

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