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Pour l’économiste Jean-Hervé Lorenzi, "la mondialisation a atteint une limite"

Jean-Hervé Lorenzi, président du Cercle des économiques, était l'invité de 'L'interview éco' sur franceinfo lundi pour évoquer les 18e Rencontres économiques d'Aix-en-Provence.

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L'économiste Jean-Hervé Lorenzi, invité de L'interview éco sur franceinfo lundi 2 juillet (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

Aix-en-Provence dans les Bouches-du-Rhône, accueille du vendredi 6 au dimanche 8 juillet les Rencontres économiques. Un événement organisé par le Cercle des économistes, dont le président Jean-Hervé Lorenzi, était l'invité lundi de franceinfo, dans 'L'interview éco". Le thème de cette 18e édition porte sur les métamorphoses du monde. "Moi j'étais favorable à la mondialisation. Mais elle a atteint une limite", a admis Jean-Hervé Lorenzi sur franceinfo.

franceinfo : En lisant le programme, on a l'impression que le monde vous fait peur cette année...

Jean-Hervé Lorenzi : Les métamorphoses sont des changements très profonds et inévitables. Certains sont positifs, d'autres négatifs. Il se trouve qu'il y a une sorte de convergence de ces métamorphoses : technologiques, climatiques, le sentiment des inégalités dans nos sociétés, le sentiment d'appauvrissement d'une partie du travail des gens. Tout ceci converge vers une vision vraisemblablement d'un monde plus anxieux et dont les règles de gouvernance vont bouger.

Pendant des années, des économistes nous ont dit que la mondialisation est heureuse, positive. Est-ce qu'ils se sont trompés ?

L'idée était très simple ; la mondialisation créait plus de richesses, il suffisait de redistribuer une partie de ce qui avait été gagné vers ceux qui avaient perdu. Il se trouve que ça n'a jamais été fait. Il y a des gens qui ont le sentiment d'avoir été victimes de cette période. C'est une réalité. La pauvreté dans nos pays a été très largement liée à ces phénomènes très brutaux. Moi j'étais favorable à la mondialisation. Mais elle a atteint une limite. Pour le développer, il faut que les gens y croient. La mondialisation va se poursuivre mais dans des conditions différentes, avec vraisemblablement des marchés plus fragmentés, une prise en compte plus importante du statut des gens. La génération qui arrive va avoir à reconstruire tout cela, dans un cadre mondialisé mais avec des règles assez différentes.

Beaucoup de salariés sont fragilisés. Quelle est la principale raison de cela ?

D'abord, la compétition mondiale sur le travail est angoissante pour les gens. Ça les fragilise. Il y a 15 ans, on disait 'Monsieur X travaille, ça coûte 100. Mais en Chine, c'est 40 fois moins'. Ce n'est pas très encourageant. Deuxième aspect : la technologie, pour le moment, est très porteuse d'une séparation entre ceux qui sont très qualifiés et ceux qui le sont moins. Il y a cette peur de toute une partie des femmes et des hommes de se dire 'Le travail que je vais avoir sera moins qualifié, je vais donc être marginalisé'. C'est ça qu'il faut essayer d'affronter et de trouver des solutions.

En changeant totalement de politique ?

Ce monde est en train de devenir un peu maboul. Les formes du dialogue disparaissent : le G7 qui ne marche pas bien, l'Aquarius qui va d'un port à un autre. Tout ça était effarant. Il faut d'abord rétablir les conditions d'un dialogue entre les parties prenantes à tous les niveaux. Au niveau mondial, il faut essayer de sauver le multilatéralisme. Nous avons bien l'intention à Aix-en-Provence de faire quelques propositions assez fortes dans ce domaine-là, au niveau mondial, européen et français.

Est-ce que vous soutenez la politique économique d'Emmanuel Macron ? Vous aviez soutenu le candidat Macron. 

Je ne change pas d'opinion trop rapidement. Je trouve qu'Emmanuel Macron a apporté une crédibilité et une confiance que l'on ne pouvait même pas imaginer. Ça fait à peine treize mois. En revanche, ce que certains ont dit, c'est qu'il va falloir donner quelques gages au centre-gauche. Je pense que le temps de remodifier des choses est plus important. Ma vraie inquiétude, c'est que pour faire des réformes, il faut de la croissance. Je souhaite, j'espère qu'on va conserver un rythme de plus de 200 000 emplois nets créés par an. Il faut faire attention que la machine ne s'enraye pas trop.

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