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Ecoutes Sarkozy : la com gouvernementale déraille

L'affaire des écoutes révèle un énième grave dysfonctionnement de la communication au plus haut niveau de l'Etat.
Article rédigé par Jean-François Achilli
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
  (©)

*"Ils ont découvert le
moyen de transformer l'or en plomb " !

*

Cette citation émane de l'un
des participants aux réunions de calage du lundi dans le bureau du Premier
ministre. Et ce qui s'est passé restera un cas d'école.

Résumons : vous avez un
ancien président de la République, possible candidat en 2017, visé par une litanie
d'enquêtes judiciaires. Arrive la bombe : le journal Le Monde qui révèle il y a six jours que Nicolas Sarkozy et son
avocat font l'objet d'écoutes téléphoniques depuis un an. Une question, parmi d'autres,
vient tout de suite à l'esprit : le pouvoir était-il au courant ?

François Hollande, Jean-Marc
Ayrault et leurs ministres ont alors sous la main une formidable occasion de
démontrer que la séparation des pouvoirs, chère à l'esprit de Montesquieu,
serait devenue une réalité. Il suffisait donc - ce jour-là ! - de caler la
parole gouvernementale, la version officielle : à savoir que la garde des
sceaux n'a été informée du principe de ces écoutes que le 26 février, à
l'ouverture de l'information judiciaire. Et ajouter que le Président et le
Premier ministre ont été prévenus à ce moment-là. Et n'ont fait aucun commentaire
afin de ne pas entraver le travail des magistrats. Point à la ligne.

Au lieu de ça, un silence
coupable a précédé une cascade d'explications tout aussi désordonnées que
contradictoires, qui ont transformé les ennuis judiciaires de Nicolas Sarkozy
en scandale politique pour François Hollande.

 

Cela n'aurait pas empêché la polémique sur les
avocats...

 

Non, ni même une question
portant sur la nécessité, ou pas, pour l'actuel président de prévenir son
prédécesseur. Le chef de l'Etat aurait eu tout loisir, par un simple
communiqué, de se réfugier derrière le respect du travail d'une justice
indépendante.

Au lieu de ça, l'exécutif a laissé
libre cours aux explications confuses de la garde des sceaux, aussitôt contredites
par le Premier ministre. Le brandissement de documents hier par Christiane
Taubira n'a fait qu'alimenter la pompe à suspicion.

Alors que dans les faits... si
vous regardez de près, il ne se passe rien ! Si ce n'est une efficace riposte
médiatique orchestrée par Nicolas Sarkozy, son avocat Thierry Herzog et toute
l'UMP, un écran de fumée qui a mis le pouvoir en place dans le corner à dix
jours des municipales.

 

Une question majeure reste en suspens...

 

A en croire la version
officielle, et ce n'est pas le moindre des mystères de cet improbable agenda,
la garde des sceaux, mais aussi le Premier ministre, auraient attendu six
jours, le 6 mars, pour prévenir le chef de l'Etat !

Soit le président est
court-circuité par son gouvernement, ce qui constitue un déni d'autorité. Soit la
vérité est ailleurs. L'entretien entre François Hollande et Christiane Taubira,
inscrit aujourd'hui à 16h à l'agenda de l'Elysée, devrait être instructif. 

La morale de cette
calamiteuse affaire, est que dans un monde où l'information circule à la
vitesse de la lumière, la communication n'est pas un accessoire pour attraper
les mouches. L'absence de com chez les politiques est aussi grave que l'excès
de com, que nous avons connu avant et pendant le précédent quinquennat.

La négligence en la matière
peut coûter très cher. François Hollande et Jean-Marc Ayrault viennent d'en
faire la cruelle expérience.

 

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