Manuel Valls face aux multiples défis de Matignon
Y aller ou pas ?
Il s'est
interrogé jusqu'au bout : mais Matignon, "ça ne se refuse
pas". La marche arrière de cet ambitieux n'est pas dans son tempérament.
Dire non à ce job – pourtant le pire de la Vème République - aurait
été synonyme de défaite, et à terme, de départ du gouvernement.
Manuel Valls, tout en consultant
à tour de bras ces derniers jours, a fait le siège du bureau de François
Hollande pour qu'il renonce à garder Jean-Marc Ayrault.
Le président et son désormais
nouveau Premier ministre sont plus alliés qu'amis. Manuel Valls pendant la
campagne avait verrouillé l'image du candidat Hollande, allant jusqu'à lui
rectifier sa cravate sur le terrain.
Son savoir-faire en matière
de communication sera le bienvenu dans
un exécutif qui en a manqué tragiquement.
Le nouveau locataire de
Matignon est censé restaurer l'autorité sur le gouvernement qui a souvent fait
défaut à un Jean-Marc Ayrault jugé trop tendre, dont le bras de fer avec Arnaud
Montebourg sur Florange restera dans les mémoires.
Il y a deux Manuel Valls...
Valls - côté pile - va remettre de l'énergie dans un moteur en panne après le
désastre des municipales. Il reste à un haut niveau de popularité, même si sa
cote a souffert de l'épisode Dieudonné.
Valls - côté face - est honni par la frange gauche du PS et par les
écologistes, lui qui avait critiqué les 35h et milité pour une TVA sociale
pendant la primaire socialiste qu'il a terminée à 6 points.
Cécile Duflot a trouvé là le bon
prétexte pour claquer la porte avant les européennes.
Les parlementaires PS les
plus hostiles vont faire monter les enchères jusqu'au vote de confiance, pour
réclamer la barre à gauche. Manuel Valls devrait leur envoyer un signal en
donnant du galon à Benoit Hamon, et à Arnaud Montebourg, ses deux alliés qui
seront promus.
Le remaniement est déjà en préparation.
Le "gouvernement de
combat" doit à la fois répondre à l'impatience de la gauche et envoyer un
signal de sérieux et d'efficacité à l'ensemble du pays. Sinon, ce sera peine
perdue.
Le chantier principal
s'appelle Bercy, où il y a trop de ministres. Pierre Moscovici n'avait aucune
information hier soir sur son propre sort. De nouveaux visages doivent apparaitre,
Ségolène Royal donnée à la jeunesse et l'éducation, François Rebsamen place
Beauvau, Bertrand Delanoë à la justice, si Christiane Taubira s'en va.
Jean-Yves le Drian, qui soutient Manuel Valls, resterait à la défense, il y a encore
deux guerres sur le feu.
Le meccano du remaniement va durer
le temps nécessaire.
François Hollande a entendu le message...
Le président au plus mal dans
les sondages n'avait pas d'autre solution que de bombarder à Matignon son très populaire
ministre de l'intérieur. Nous allons tous surveiller de près, dans les premiers
mois, leurs courbes respectives. Vont-elles se croiser un jour ?
Manuel Valls a une double
mission : réenchanter un pays aussi fracturé que déprimé, la tâche est
immense. Et sur un plan plus personnel, faire mentir la malédiction de
Matignon, celle qui a jadis frappé Michel Rocard placé là par François
Mitterrand pour mieux l'éliminer. Les seuls Premiers ministres qui ont eu un destin
présidentiel sont ceux qui ont démissionné.
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