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Projet de loi de finances 2023 : qui est Mélanie Joder, cheville ouvrière de Bercy ?

L’intrus de l’actu donne chaque soir un coup de projecteur sur une personnalité qui aurait pu passer sous les radars de l’actualité.

Article rédigé par franceinfo - Bérengère Bonte
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le ministère de l'Énomie et des finances à Paris, le 8 avril 2020. Photo d'illustration. (BERTRAND GUAY / AFP)

Grande patronne de la DB - la direction du Budget - mais petite femme, lunettes rondes, visage presque enfantin malgré ses 43 ans. Depuis qu’elle a pris son poste à l’été 2021 au 8e étage du bâtiment Colbert à Bercy, son quotidien est rythmé par ces trois lettres : PLF pour Projet de loi de finances. Et comme tous ces hauts fonctionnaires au service de l’Etat, Mélanie Joder ne dit pas "je", mais "nous" : "Oui, parce que c'est un travail d'équipe et que j'ai des collaborateurs de talent. Mais moi, mon rôle, c'est de piloter la direction. Près de 250 personnes dans l'administration centrale, plus des personnes qui sont implantées dans les différents ministères, pour que chaque euro qui est dépensé par l'État soit efficacement dépensé."

Depuis le début de l’année, l'organisation est millimétrée. De janvier à avril, il faut esquisser un budget, intégrer les dépenses nouvelles liées à la campagne présidentielle. Dans la foulée trouver les économies potentielles. En mai, il faut faire entrer les financiers de chaque ministère dans la danse. En juin, auditionner les ministres. En juillet, faire signer les lettres plafond de chaque ministère par la Première d’entre eux. Et boucler l’ensemble du texte pour le premier mardi d’octobre. Avant d’accompagner tout le parcours parlementaire, les amendements jusqu’à fin décembre.

Désormais, la transition écologique prend aussi beaucoup de place. Un nouvel indicateur va permettre de mettre face à face les dépenses "vertes" et les dépenses "brunes" ou "neutres". C’est ce qui amène Bruno Le Maire, lundi 26 septembre, à dire que le budget penche encore trop du côté des énergies fossiles. L’objectif, explique Mélanie Joder, sera d’améliorer ce ratio de 10% d’ici la fin du quinquennat.

"J’ai été du côté de ceux qui dépensent et de ceux qui serrent les cordons"

Comment se retrouve-t-on Directrice du Budget ? C’est sans doute une tournure d’esprit, due en partie à un papa comptable public. Mais l’idée de travailler dans les finances publiques n’est pas venue avant Sciences Po et ne s’est vraiment installée qu’à l’ENA, dont l’alsacienne sort major en 2005. Elle choisit l’inspection des finances où elle passe quatre ans avant de découvrir la Direction du Budget. Elle alterne ensuite les années en cabinet ministériel (avec François Fillon à Matignon, Valérie Pécresse au Budget) mais elle sera aussi Directrice Générale déléguée d’Universcience (qui regroupe le Palais de la Découverte et la cité des sciences) et dont elle garde une réelle inquiétude sur le manque de culture scientifique dans le pays. "J’ai été du côté de ceux qui dépensent et de ceux qui serrent les cordons", dit encore Mélanie Joder quand elle regarde l'ensemble de son parcours. Forcément ça aide.

Une femme à ce type de poste n’a rien d’une première. Celle qui l’a précédée, Amélie Verdier est d’ailleurs restée cinq ans. Elle accompagne en outre une Première ministre, une présidente de l'Assemblée nationale, une secrétaire générale du gouvernement. Quand on l'interroge sur le sujet, la Directrice du Budget récuse pourtant toute idée de féminisme. En réalité, le discours a singulièrement évolué. Voici ce qu'elle dit par exemple aux étudiants sur l'équilibre vie pro et vie perso : "Aux élèves qui sortent de l'INSP, l'ancienne ENA, j'ai passé un message majeur qui est que l'époque du moine soldat à la direction du budget, c'est fini ? Dans notre comité de direction à la direction du budget, il y a la moitié des sous directeurs, y compris moi et mon adjoint, qui ont des enfants de moins de 5 ans. Quand il y a une varicelle le matin ou qu'il faut aller faire le 26ᵉ test Covid-19 avant de déposer l'enfant à l'école, on sait ce que c'est."

Un Monopoly du budget

Pour l'anecdote, ses deux enfants tiennent un compteur de lecture d'histoires du soir. L'idée étant que, à la fin de la semaine, les deux parents en aient lues autant l'un que l'autre. Si vous vous dites que ce n'est quand même pas un endroit où on s'amuse tous les jours. Globalement, ce n'est pas faux... Encore que ! Derrière son bureau, affiché sur le mur, trône un Monopoly secret du Budget. Le mode d'emploi prévoit même les passages en prison. "Le Monopoly du budget, c'est vraiment fait par les équipes pour l'ambiance dans la direction, explique Mélanie Joder. Quand on est en prison, nous sommes dans ce qu'on appelle une R.I.M non conclusive, c'est-à-dire une réunion interministérielle qui n'aboutit pas encore à une décision. Vous avez le bouclier tarifaire qui est assez cher. C'est vraiment pour la plaisanterie entre deux projets de loi de finances rectificative." Évidemment, tout se compte en millions d'euros. Ne cherchez pas ce Monopoly, il n'est pas disponible pour le grand public.

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