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Des tomates ont été boostées à la vitamine D

C’est un gros enjeu : la vitamine D est très présente dans les nourritures animales. Il y a donc de grosses carences, notamment chez les végétariens. Des chercheurs sont parvenus, en intervenant sur un gène de la tomate, à la forcer à en produire et à en stocker. 

Article rédigé par franceinfo - Mathilde Fontez
Radio France
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Temps de lecture : 2 min
Dans 10 ou 15 ans, mangerons-nous des tomates enrichies à la vitamine D ? Des chercheurs y travaillent mais la question va relancer le débat sur la commercialisation des OGM. (Illustration) (ALI MADKHALI / EYEEM / GETTY IMAGES)

Mathilde Fontez, rédactrice en chef du magazine scientifique Epsiloon revient aujourd'hui sur une prouesse en biogénétique, sur l’un des fruits les plus consommés : la tomate.

franceinfo : Des chercheurs ont réussi à modifier des tomates pour qu’elles s’enrichissent en vitamine D ?   

Mathilde Fontez : Oui. Normalement les tomates ne contiennent pas de vitamine D. Ni aucun fruit d’ailleurs. Ce nutriment essentiel à notre santé, on le trouve dans des aliments d’origine animale comme les œufs, la viande, les produits laitiers. Et on le produit un peu nous-mêmes, en s’exposant au Soleil.

Sauf qu’on compte aujourd’hui dans le monde 1 milliard de personnes qui sont carencées en vitamine D, soit pour des problèmes de ressources alimentaires, soit parce qu’ils évitent justement les produits d’origine animale. D’où l’idée de ces chercheurs, une équipe internationale, pilotée par un centre de recherche anglais, d’essayer de modifier les gènes de la tomate pour qu’elle produise de la vitamine D pendant sa croissance. Et qu’elle en contienne ensuite quand on la mange.

Ils ont fabriqué un OGM 

Oui, avec une technique qui s’appelle CRISPR-Cas-9. Cette technique a totalement révolutionné les recherches en génétique – c’est le prix Nobel de chimie de 2020. Elle permet d’intervenir très facilement sur un gène en particulier. Les chercheurs ont d’abord étudié en détail la biochimie de la tomate, et ils ont découvert qu’elle fabrique naturellement un produit précurseur de la vitamine D. Il s’appelle la provitamine D3.

Sauf qu’ensuite, dans la nature, la plante ne transforme pas cette provitamine D3 en vitamine D : elle la convertit en substances de défense. Les chercheurs ont donc identifié le gène qui commande ce processus, et ils l’ont modifié pour qu’il déclenche la production de vitamine D. Ça marche : la plante s’est mise à en fabriquer, sans que ça nuise à sa croissance. 

Et ces plants de tomate parviennent à survivre dans un champ dans la nature ?  

C’est la prochaine étape. Là, tous les tests ont été faits en laboratoire. Et il faut vérifier, en effet, que la plante génétiquement modifiée va être résistante en conditions réelles. Les chercheurs ont obtenu l’autorisation de lancer des cultures à l’extérieur le 1er juin. Ensuite, avant d’imaginer qu’on puisse manger, si on le souhaite, des tomates boostées en vitamine D, il faudra attendre de nombreuses années.

Ça pose des questions éthiques, environnementales…  

Oui, cet exploit technique va poser de nouveau la question d’autoriser ou non la culture et la vente d’OGM. Il y a déjà eu un exemple très similaire, avec le riz doré : un riz qui a été modifié pour contenir de la vitamine A, et lutter contre les carences – exactement comme la tomate. Ce riz a été réalisé en laboratoire en 2000 et sa culture n’a été autorisée, aux Philippines, que l’année dernière.

Le débat sur les risques pour la santé et l’environnement continue de faire rage. En Europe, c’est interdit : l’Union européenne interdit la plupart des cultures d’espèces génétiquement modifiées. Mais la Grande Bretagne vient justement de présenter un projet de loi pour faciliter la culture et la commercialisation de ces nouveaux OGM, les OGM qui, comme la tomate, ont été modifiés très localement. Ce débat scientifique et environnemental va donc être relancé.   

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