Le grand retour de la bande magnétique
C’est une vieille techno, qui fêtera son centenaire en 2028. Les moins jeunes se souviennent, sans doute un peu nostalgiques, de cette très fine bande de plastique noire, enroulée dans une cassette. Elle permettait d’écouter les tubes de Run-DMC sur baladeur. Ou de regarder Retour vers le futur, en mode VHS sur magnétoscope. Les précisions d'Hervé Poirier, rédacteur en chef au magazine scientifique Epsiloon.
franceinfo : C'est le grand retour de cette bande magnétique vintage ?
Hervé Poirier : Après avoir, temporairement, été remplacée par le CD, on croyait il y a 20 ans, qu’en matière de stockage des données, les disques durs avaient définitivement gagné. Eh bien non : la demande pour la bande magnétique est en train d’exploser.
Attention : cela ne veut pas dire que les radiocassettes et les magnétoscopes vont revenir dans les maisons. L’enjeu est en fait dans les centres de stockage de données.
Quel intérêt de cette techno qui semble un peu dépassée ?
C’est d’abord lié au contexte global : tous les deux ans, la quantité de données enregistrées dans le monde double. Ce qui n’est pas tenable avec les disques durs des data centers, qui consomment en permanence énormément d’énergie et d’eau. La bande magnétique, elle, n’a besoin d’énergie qu’au moment où elle est consultée. Et elle connaît des progrès technologiques fulgurants.
Alors que la densité d’information sur disque dur stagne, Fujifilm a présenté il y a quelques mois une cassette dont la bande, dotée de 20.000 pistes de stockage, peut contenir jusqu’à 50 téraoctets de données, l’équivalent de 330.000 heures de vidéos, qualité VHS.
Un prototype d’IBM monte même jusqu’à presque 4 millions d’heures de vidéos ! Sachant que la cassette est plus fiable (le taux d’erreur est 10.000 fois plus faible que sur disque dur), avec une meilleure durée de vie (30 ans, contre 10), moins chère (c’est principalement du plastique), et plus sécurisée (pas possible de les hacker).
C’est la techno des disques durs qui risque alors de disparaître ?
Non. Car la bande magnétique a un défaut : l’accessibilité. Les moins jeunes s’en souviennent aussi : pour enregistrer ou lire une cassette, il est nécessaire de rembobiner mécaniquement la bande. Les données auxquelles on veut avoir vite accès, resteront donc stockées sur disques durs : ce sont les données plus froides, issue de la recherche scientifique, des grandes entreprises ou des agences gouvernementales, qui iront sur bandes.
C’est le rapport à l’instantanéité qui est en train d’être repensé. Et dans ce nouveau monde, oui, la bonne vieille cassette est bien de retour.
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