Les Vikings ont survécu à l’apocalypse

Toute une mythologie nordique évoque la légende apocalyptique du Ragnarök, la fin du monde accompagnée d’un hiver terrible. Deux études archéologiques au Danemark, montrent que cette période glaciale a bien eu lieu, en l’an 536, suite à deux éruptions volcaniques majeures.
Article rédigé par franceinfo - Vincent Nouyrigat
Radio France
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Temps de lecture : 4min
L’Aube du Ragnarök et la légende nordique, aujourd'hui confirmées par deux nouvelles études archéologiques danoises. (Illustration d'un jeu vidéo sur cette légende) (UBISOFT)

Vincent Nouyrigat, rédacteur en chef du magazine Epsiloon, nous parle aujourd'hui de deux études récentes, menées par des archéologues, qui tendent à démontrer que la fin du monde accompagnée d’un hiver terrible, racontée dans la légende nordique du Ragnarök, pourrait bien avoir un lien avec un terrible hiver remontant à l'an 536.

franceinfo : Ces archéologues ont détecté les traces d’un évènement climatique catastrophique raconté dans la mythologie scandinave ?

Vincent Nouyrigat : Oui, plusieurs séries télé récentes y font référence, les peuples nordiques se sont transmis, de génération en génération, une légende apocalyptique sur la fin du monde, le Ragnarök, précédée d’un hiver terrible s’étalant sur trois années ; trois ans sans soleil.  

On pourrait croire que ces mythes ne sont que des balivernes, tout juste bonnes à faire trembler les enfants, le soir, au coin du feu. Mais deux études à paraître dans les prochaines semaines, ont repéré au Danemark les traces, vers l’an 536, de ce terrible hiver – en tout cas, un refroidissement très fort, brutal et durable. En l’occurrence, les cernes des vieux chênes de cette époque y sont particulièrement fins, la croissance des arbres semble avoir ralenti de plus de 50%.

Autre indice frappant : sur les 39 sites archéologiques étudiés au Danemark, les chercheurs ne distinguent presque plus de production céréalière à ce moment-là… Comme si tous les fermiers avaient abandonné leurs champs, ou avaient succombé à un mal inconnu. Et ce constat déchirant rejoint d’autres études archéologiques menées en Scandinavie.  

Mais qu’est-ce qui a provoqué cette apocalypse ? 

Rien de surnaturel, bien sûr, simplement une gigantesque éruption volcanique. Ou plutôt l’enchaînement improbable de deux éruptions explosives majeures en 536 puis en 540, a priori sur le continent américain. Ces cataclysmes ont enveloppé la planète d’un voile de cendres, bloquant la lumière du soleil – la température moyenne mondiale aurait ainsi baissé de près de 3°C, avec des effets particulièrement forts dans les hautes latitudes.  

De quoi empêcher les récoltes de pousser et de mûrir ; les historiens imaginent de terribles famines, quelques études suggèrent la disparition de la moitié de la population en Suède et en Norvège. Certains chercheurs parlent même de l’année 553, comme de la pire année de l’histoire de l’humanité. 

Mais, finalement, ces populations scandinaves s’en sont remises ? 

Oui, c’est aussi ça que l’on peut retenir, deux siècles plus tard, s’ouvrait l’Âge d’or des Vikings. Les archéologues constatent dans ces études que les agriculteurs ont tiré les leçons de ce choc, en diversifiant leurs cultures, afin d’assurer une meilleure sécurité alimentaire. Ils ont su s’adapter. Avec notamment l’émergence de la culture du seigle, une céréale d’hiver, rustique, bien adaptée au froid et au manque de soleil – le pain au seigle est encore très apprécié au Danemark. 

L’étude de cet épisode dramatique fait forcément écho à notre situation, alors que nous sommes exposés aux évènements extrêmes liés au réchauffement – et nous ne sommes pas non plus à l’abri d’une salve d’éruptions volcaniques perturbantes. Comme quoi, pour affronter les périls à venir, il est parfois bon d’écouter de vieilles histoires, même si elles semblent difficiles à croire.  

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