Nos avatars nous influencent

Mathilde Fontez, rédactrice en chef du magazine scientifique Epsiloon, nous parle aujourd'hui de l’effet de nos avatars sur notre comportement. Nos avatars, ce sont ces personnages derrière lesquels ont se cache dans les jeux vidéo, et qui nous influencent.

franceinfo : On serait donc influencé par nos avatars, c’est ce que démontre une nouvelle étude, avec un avatar de Léonard de Vinci ?  

Mathilde Fontez : Oui, les chercheurs, une équipe menée par Geoffrey Gorisse, de l'Institut des Arts et Métiers de Laval, ont hésité. Ils ont pensé à utiliser Steve Jobs ou Elon Musk, mais ils ont finalement choisi Leonard de Vinci, pour tester le pouvoir des avatars – le génie créatif par excellence. La question qu’ils se sont posée c’est : que se passe-t-il quand on se met dans la peau d’un tel inventeur ?

Est-ce que ça joue sur notre comportement ? Nos capacités cognitives ? Est-ce qu’un avatar Léonard de Vinci nous rend plus créatifs qu’un avatar basique, un avatar qui nous ressemble ? Ils viennent de révéler les résultats de leurs tests, à la conférence internationale sur la réalité augmentée, qui s’est achevée hier à Sydney, en Australie.

Et la réponse est oui…

Clairement oui : les participants aux tests qui étaient incarnés par Leonard de Vinci se sont révélés bien plus créatifs que les autres : ils ont généré plus d’idées par exemple, pour imaginer un usage détourné pour un globe terrestre.

Par contre, ils ont été plutôt moins bons, dans ce qu’on appelle la "pensée convergente" : la rapidité, la précision, la logique. Ce que montre cette étude, c’est que oui : un avatar, ça n’est pas anodin, ça modifie bel et bien notre façon de penser.

Un peu comme un vêtement peut jouer sur notre humeur ? 

Oui, ou une posture : il a été démontré que si vous adoptez la pose de superman, vous allez vous sentir plus confiant. Avec l’avatar, c’est la même chose : les chercheurs pensent que le personnage que l’on choisit amène avec lui les stéréotypes qui lui sont associés :  si je suis grand, je devrais me comporter avec plus d’assurance.

Un avatar grand rend plus confiant ?

Oui. Et un avatar d’athlète dope les capacités sportives ; un avatar féminin rend les hommes moins sexistes. Cet effet a un nom : l’effet Proteus. Il est bien réel. Et certaines études montrent qu’il perdure, une fois qu’on est redevenu nous-mêmes.

Ça donne aux chercheurs des idées de traitements, pour soigner des troubles du comportement, avec la réalité virtuelle par exemple. Et ça remet un peu en perspective les panels d'avatars proposés par les éditeurs de jeux vidéo : leur design n’a rien d’anodin, puisqu’il agit sur nous.