On a vu pour la première fois des éléphants enterrer leurs morts
Hervé Poirier, rédacteur en chef au magazine scientifique Epsiloon, nous parle aujourd'hui d’un très étrange témoignage.
franceinfo : On a vu pour la première fois des éléphants enterrer leur mort. Expliquez-nous…
Hervé Poirier : C’est très troublant. Très touchant, même. Cinq cas viennent d’être documentés par un chercheur indien et un responsable des services des forêts, dans le nord du Bengale. Ça s’est passé dans les plaines où le thé est cultivé.
Des éléphanteaux sont morts de façon naturelle, par maladie ou accidents – une autopsie a été réalisée après coup. Dans les cinq cas, leur corps a été transporté par le troupeau sur une longue distance jusqu’à un lieu éloigné des habitations. Il a été mis dans un trou, sur le dos, avec la tête, le tronc et le corps enterrés, les pattes sortant de la terre. L’examen des corps suggère que l’éléphanteau y a été placé délicatement, saisi par les pattes.
Les traces de pas sur le sol indiquent un effort combiné du troupeau, pour niveler le sol autour du corps. De forts et longs barrissements ont parfois été entendus, pendant près d’une heure. Dans certains cas, le troupeau est revenu plus tard sur le lieu. Ils l’ont ensuite évité avec soin, en empruntent des itinéraires parallèles. Bref, c’est la première description détaillée de ce qui semble être un enterrement animal méthodique et délibéré.
On n’avait jamais observé un tel comportement jusqu’ici ?
Non. On connaît quelques rites funéraires chez les grands mammifères. Des primates qui portent leurs bébés morts pendant plusieurs jours. Ou des mères orques qui maintiennent à la surface de l’eau leur petit décédé. Seuls, quelques rares cas d’enterrements avaient déjà été évoqués pour l’éléphant d’Afrique, mais jamais de façon aussi précise et documentée.
Ce rite semble finalement assez proche des funérailles des humains ?
La vie mentale et émotionnelle des éléphants reste largement mystérieuse. On sait que c’est un des rares animaux à posséder comme nous des neurones dits "en fuseau", qui jouent un rôle clé dans le traitement des émotions, de l’empathie, et de la conscience de soi. Ils ont aussi un gros hippocampe, ce qui leur confère leur fameuse mémoire.
Bref, ils sont équipés pour ressentir comme nous la douleur de la perte d’un proche. On avait déjà vu des éléphants, face à la mort d’un proche, rester près du corps, le toucher, essayer de le relever, revenir même plus tard près du cadavre. Contrairement au mythe, les éléphants n’ont pas de cimetière. Mais, oui, comme nous, ils ont des tombes…
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.