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Enquête franceinfo
OnlyFans, Mym... De nombreux jeunes attirés par le "cercle infernal" de l'argent facile grâce aux contenus érotiques en ligne
"On est dans ma pièce de vie, qui est très particulière, c'est là que la magie opère...", glisse Chanice Aphrodix, dans son studio où elle vit à côté de Paris, et d'où prend elle prend les photos qu'elle poste ensuite depuis plus d'un an et demi sur OnlyFans et Mym. Ces plateformes proposent depuis plusieurs années à n'importe qui de vendre des photos ou des vidéos contre un abonnement, souvent d'une dizaine d'euros par mois. On y trouve des photos de cuisine ou des vidéos de sport, mais ce sont les contenus érotiques, voire pornographiques, qui ont fait la renommée de ces deux sites.
La particularité de ce nouveau commerce de la pornographie réside dans le fait que ce ne sont pas des stars du X qui se dévoilent, mais des modèles amateurs qui espèrent ainsi se faire un peu de revenus. Comme tous les jours, la jeune femme de 27 ans est sur son canapé, les yeux rivés sur son téléphone. "Je me connecte à ma plateforme, si je veux poster, j'appuie sur le petit symbole '+'". Seuls les abonnés qui ont payé peuvent accéder au contenu : "Je le propose pour une dizaine d'euros, ça dépend de la plateforme. On a des commissions : sur dix euros, je ne gagne que cinq euros."
"Si je m'adapte au client, je peux faire encore plus de sous"
Ces plateformes cachent en réalité un cercle vicieux. "Le meilleur mois que j'ai fait, c'était environ 500 euros, ajoute Chanice Aphrodix. On se dit que c'est un bon début, mais si je fais encore plus de contenus, et si je me force à produire encore plus et si je m'adapte à la demande du client, je peux faire encore plus de sous, et là, on rentre dans un cercle infernal, avec le risque de se perdre dans un truc malsain."
Depuis quelques mois, un nouveau business émerge. Sur TikTok, le profil est souvent le même : des hommes proposent promettent beaucoup d'argent. Ils donnent des conseils, soit pour que les comptes OnlyFans rapportent davantage, soit des conseils pour monter une "agence OnlyFans", sur le principe d'une agence classique de mannequins. "C'est un business en plein essor qui ne nécessite presqu'aucun investissement et qui peut te rapporter plus de 20 000 euros par mois", peut-on entendre dans l'une de ces vidéos.
Sur Internet, des sites se présentent comme de véritables agences de mannequins pour OnlyFans et Mym. Il est impossible de les contacter par téléphone, même après avoir postulé. Au milieu de photos dénudées sur Internet, ces agences promettent en résumé de devenir une star, et même un accompagnement juridique et moral.
"Jusqu'à 80 % de commissions"
"Tout n'est pas aussi carré que ce que l'on peut voir sur les sites avec des contrats en bonne et due forme, alerte Audrey, qui tient la page "Vos stars en réalité" sur les réseaux sociaux. Certaines agences peuvent prendre jusqu'à 80 % de commissions, parfois il y a des dérives avec ces agences qui abusent très clairement de leur modèle et prennent aussi en charge le compte Instagram, TikTok ou Twitter. Certaines filles ont des images publiques qui ne leur correspondent pas du tout. Ces agences tiennent les chats de communication avec les clients, et du coup, ce sont des vidéos qui sont demandées aux créatrices et aux créateurs qui ne sont pas forcément des vidéos souhaitées. Il peut y avoir du manque de respect, des vols de vidéos."
"J'ai eu des témoignages de créatrices qui se faisaient voler des vidéos par les agents, et les vidéos sont revendues sur des canaux Telegram."
Audrey, créatrice de la page Facebook "Vos stars en réalité"à franceinfo
L'entreprise française Mym a été fondée en 2019 et compte 12 millions d'utilisateurs. Elle a multiplié son chiffre d'affaires par 25. "Tous les deals qui peuvent être passés entre des créateurs de contenus et des agences, sont des choses qui sont faites hors de la plateforme et qu'on ne peut pas voir, se défend Gauthier Lapeyronnie, qui travaille pour Mym. On sait qu'il y a des agences qui sont moins recommandables. Notre rôle, c'est de faire énormément de prévention auprès des créateurs de contenus, d'essayer de faire en sorte qu'ils puissent avoir les bons réflexes au moment où ils vont souhaiter entamer des discussions avec ces agences, ou que ça se passe bien et qu'ils s'assurent que ce soit bien des agences qui les accompagnent".
La plateforme ne veut plus tellement communiquer sur ce sujet et veut mettre en avant les autres contenus plus grand public, comme la cuisine et le coaching sportif. Mais selon Audrey, ce sont bien les contenus érotiques qui font tourner les plateformes. "Moi, je compare Mym et OnlyFans à l'industrie pornographique, explique la jeune femme. On a vu des publicités de Mym et de Onlyfans chez les influenceurs, ça incite à fréquenter la plateforme dans ce cadre-là." De son côté, Mym assure que moins de 50 % des créateurs font de l'érotique ou de la pornographie sur leur site.
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