"Le gars joue sa chemise tous les soirs" : Bruce Springsteen, bête de scène iconique, de passage à Paris
Dans un concert du Boss, il y a d'abord l'attente, longue, la foule qui rugit quand son héros apparaît au fond de la scène. Et puis, le gimmick de toujours, pour lancer les hostilités, ce décompte "one, two, three, four !" qui fait hurler le public.
Cinq décennies que le rockeur ultime parcourt les salles et les stades du monde entier. Devant lui, presque une famille, des fans fidèles, un public de connaisseurs. Parmi eux, Belkacem Bahlouli, directeur de l'édition française de Rolling Stone, auteur de plusieurs livres sur le Boss. Il a fait chaque tournée depuis 1981, et était au Madison Square Garden, le mois dernier pour l'étape new-yorkaise. Il sera évidemment, samedi 13 et lundi 15 mai, dans la salle Paris La Défense Arena pour assister aux concerts de Bruce Springsteen, et selon lui, "beaucoup ont claqué pas mal de sous pour traverser la France, ou viennent de pays étrangers, juste pour revoir et revivre cette sensation de Bruce sur scène, qui est un truc incomparable. Par rapport à l'euphorie que peuvent provoquer les Stones ou la nostalgie pour McCartney, on est encore dans une autre dimension".
"On ne vient pas écouter l'oracle, on vient se faire bombarder les oreilles, pilonner les yeux par un spectacle de dingue."
Belkacem Bahlouli, directeur de "Rolling Stone France"à franceinfo
Le pire, c'est que ce n'est pas nouveau, ajoute-t-il : "Dès ses débuts, il faisait ce genre de concerts. C'est un gars qui jouait, à 18 ou 20 ans, deux sets par jour de trois heures dans des bars, à apprendre le métier". Et à 73 ans, Springsteen privé de tournées à cause de la pandémie, avait des fourmis dans les jambes. "Contrairement à d'autres, il continue à chanter ses chansons dans les mêmes tonalités, reprend Belkacem Bahlouli. La voix est moins présente, mais il garde cette aura sur scène. Le gars a une santé de fer : un repas par jour, il se lève avec le soleil et se couche avec les poules, ne boit pas, ne fume pas..."
Avec 30 concerts en Europe jusqu'à fin juillet, à raison de trois heures chaque soir, Bruce Springsteen aura passé quelque chose comme quatre jours complets sur scène. Le tout avant de repartir dès le mois d'août pour une tournée des stades aux États-Unis.
La scène, un enjeu
Avec 18 personnes sur scène, le mythique E Street Band toujours-là, il faut pouvoir assumer pour se targuer d'accueillir le Boss. Pour la France, c'était le Stade de France ou Paris La Défense Arena. À la tête de la salle de 40 000 places, Bathilde Lorenzetti est évidemment ravie que le choix se soit porté sur elle : "Cela faisait trois ou quatre ans qu'on en discutait avec le producteur, Gérard Drouot Productions (producteur historique en France, alors que le géant Live Nation le fait tourner dans le monde) et c'était une chance, c'était magique. C'est le vrai live à l'état pur".
Mais en France, c'est en 2009 qu'a eu lieu l'un des plus grands concerts du Boss, aux Vieilles Charrues, à Carhaix."On rêvait de faire venir Springsteen sur notre festival, et chaque année, on passait une offre à Gérard Drouot en tentant de le faire, se souvient Jean-Jacques Toux, le programmateur historique du festival. Et puis, à chaque fois, la réponse était que Springsteen ne faisait pas de festival. Je crois qu'il y avait 140 personnes sur la route. L'énorme production".
"On a fait l'annonce le jour de la prise de pouvoir de Barack Obama, avec Springsteen sur scène à ses côtés. Ce jour-là, forcément, on savait qu'on allait accueillir une énorme légende."
Jean-Jacques Toux, programmateur des Vieilles Charruesà franceinfo
Sur le livre d'or du festival, au moment de repartir, Bruce Springsteen avait laissé quatre mots : "Just a perfect day".
Une relation au public spéciale
Bruce Springsteen, c'est l'idole de plusieurs générations, de tous les milieux sociaux. Lors de ses concerts, ses fans viennent avec des pancartes, sur lesquelles ils inscrivent leurs morceaux préférés et sur scène, le Boss adapte la setlist chaque soir. Belkacem Bahlouli se souvient "d'un concert à Londres où il a interpellé un gars dans le public en lui disant 'toi, je te vois depuis Séville avec ta pancarte qui me réclame une chanson'. Séville, c'était quinze jours avant. Il prend le micro, il dit 'on va la jouer pour toi. Tu veux une guitare ? Vas-y'".
Quant à Jean-Jacques Toux, aux Vieilles Charrues, il ne pourra jamais oublier son entrée sur scène : "Avant de monter sur scène, il avait demandé de lui écrire comment on dit 'bonjour Carhaix' en breton. Il est monté sur scène et il a mis tout le public dans sa poche en disant 'Demat Karaez !' Ça reste parmi les très, très, très grands moments de notre festival, sinon le grand moment pour beaucoup d'entre nous".
Samedi et lundi, il y aura forcément des drapeaux bretons, comme dans tous les concerts, et puis un cadeau pour Springsteen, de la part de Bathilde Lorenzetti : du vin rouge de la propriété du groupe de la famille, dans le Bordelais. Du vin qu'il ne boira donc pas, trop occupé à préserver sa santé de marathonien, pour poursuivre des tournées gigantesques tant qu'il le pourra. Avec la même énergie tous les soirs.
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