Reform UK, le parti europhobe et anti-immigration qui secoue le Royaume-Uni
Les sondages les plus récents lui accordent 15% des intentions de vote pour les prochaines élections législatives, organisées fin 2024 au Royaume-uni. Dans les enquêtes d'opinion, le parti Reform UK grignote lentement des parts au Parti conservateur (crédité à 19% dans le même sondage). Ce mouvement aux idées radicales, né sur les ruines du Brexit party, reprend les promesses non tenues par le gouvernement ces dernières années. Le tout dans un contexte de pouvoir d’achat en berne et avec une obsession : l'immigration zéro, en particulier les embarcations qui traversent la Manche depuis les côtes françaises.
"C’est, sans le moindre doute, une menace pour la sécurité nationale, a martelé Richard Tice, le leader de Reform UK, dans sa tribune libre du dimanche sur la chaîne de télé GB News. Ce qu’il faut, c’est du courage et du leadership. Malheureusement, il n’y en a pas au gouvernement, pas non plus dans la fonction publique. Vous pouvez arrêter les bateaux. Vous récupérez les passagers en toute sécurité, comme on le fait déjà, mais au lieu de les emmener à Douvres, vous les ramenez à Dunkerque. Nous avons le droit de le faire, j’ai lu les traités. C’est le seul moyen de stopper les bateaux."
Des électeurs pro-Brexit et de droite
Reform UK défend le Brexit, même si la majorité de la population pense aujourd’hui que c’était une erreur. Le mouvement affirme qu’il a été mal appliqué, en reprend les promesses initiales et décrète qu’il fera mieux. Un discours encore plus radical qui séduit une partie des électeurs qui ont voté pour le parti conservateur lors des dernières élections générales, en 2019.
"Dans ma famille, en général, on vote toujours conservateur. Mais cette fois, ça suffit. Ils ne font rien. Ils sont trop mous. Reform UK m’intéresse, et pas seulement moi. Je vois bien que leurs idées circulent dans tout le pays", témoigne Josh, maçon d'une trentaine d'années de Northampton. Des idées qui sont également défendues par des élus conservateurs eux-mêmes. La frange la plus dure, celle qui voudrait un leader à poigne et qui trouve le Premier ministre Rishi Sunak hésitant.
En plus d'une perte de vitesse dans les sondages, le parti conservateur voit certains de ses membres passer de l'autre côté. Le candidat désigné à la mairie de Manchester a annoncé qu’il rejoignait Reform UK. Avant lui, c’est l'ancien vice-président du parti conservateur, le député Lee Anderson, qui a fait défection. "Les conservateurs ont légitimé et normalisé la rhétorique et la politique proposées par Reform UK", estime Tim Bale, professeur en sciences politiques à l’université Queen Mary de Londres, pour qui la majorité actuelle, au fil des ans, a préparé le terrain à un mouvement plus radical.
"Ce qui était auparavant considéré hors limite ou en marge, paraît aujourd’hui tout à fait normal. Les conservateurs ont en fait contribué à rendre leur situation encore pire", estime le professeur.
Reform UK refuse pour autant l’appellation "extrême droite." Sous la menace d’une plainte, la BBC (média public britannique) a même présenté des excuses pour l’avoir qualifié de la sorte. Tim Bale parle, lui, d’une droite radicale populiste, qui oppose constamment le peuple aux élites, à l'image d'un modèle américain porté par Donald Trump. "Les conservateurs ont toujours regardé de l’autre côté de l’Atlantique pour trouver l’inspiration. Ils n’ont jamais cru qu’il pouvait apprendre quoi que ce soit de leurs homologues en Europe. Évidemment, pour certains, Trump apparaît comme un modèle", juge Tim Bale.
Malgré les récents sondages, Reform UK ne devrait pas gouverner le pays à l'automne prochain. Dans un scrutin à un seul tour, il est même probable qu’il ne remporte pas un seul siège de député lors des élections. En revanche, il peut faire chuter encore plus lourdement les conservateurs. Pendant ce temps, les travaillistes caracolent en tête des sondages avec plus de 20 points d’avance. La majorité leur semble promise après plus de 13 ans dans l’opposition.
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