Reportage
"J'ai pris mon CV pour être Premier ministre" : entre ironie et inquiétude, paroles de Français samedi à l'Élysée, lors des Journées du patrimoine

Le nouveau gouvernement et la situation politique intéressent aussi les Français qui profitent ce week-end des Journées du patrimoine. Notamment à Paris où ils étaient des milliers samedi à faire la queue pour visiter le palais de l'Élysée, résidence présidentiel et lieu de pouvoir par excellence.
Article rédigé par Sandrine Etoa-Andegue
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Le palais de l'Elysée est l'un des bâtiments officiels les plus visités chaque année lors des Journées du Patrimoine. 21 septembre 2024 (SANDRINE ETOA-ANDEGUE / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

La visite du palais de l'Élysée, ouvert au public pour les Journées du patrimoine, commence dans l'un des jardins à la française, traversé par une longue file d'attente. Arnaud trépigne devant une fontaine. "C’est une première fois, confie-t-il. Ça faisait longtemps qu’on essayait de venir faire la visite et cette année, on a eu la chance de pouvoir s’inscrire".

Pour Arnaud, le contexte importe peu, "c’est vraiment une journée de découverte du patrimoine". Il avoue être "un peu" fatigué de la politique et ne pas avoir envie d’en parler. Juste derrière lui dans la queue, Adissa, une ingénieure d’une quarantaine d’années, se sent "privilégiée d’être là". "C’est le siège du pouvoir en France donc c’est une opportunité, un lieu d’exception. On n’y rentre pas tous les jours", souligne-t-elle. Le palais de l'Élysée, un lieu hors du temps, coupé des bruits de la ville, pour Arnaud son mari, qui décrit "vraiment un îlot au cœur du quotidien". Il ne cache pas avoir un "petit espoir de rencontrer le président" pour lui remettre son "CV pour être Premier ministre", s’amuse-t-il. À la remarque que l’occupant de Matignon a déjà été choisi, il ajoute : "Je ne suis pas sûr qu’il ait une grande espérance de vie donc je garde mon CV à portée".

Une visiteuse dans le bureau du président de la République à l'Elysée le 21 septembre 2024 (SANDRINE ETOA-ANDEGUE / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

"Visiter ce symbole de la République, rester concentré sur l’essentiel"

Michel Barnier est l'homme de la situation, estime son voisin Mouad, 24 ans. "Honnêtement, je ne vois pas une personne qui est mieux placée pour ce poste, de par son expérience, son historique de négociateur, de personne qui sait faire des compromis. C’est ce qui est demandé dans ce contexte un peu difficile. Je pense qu’on est dans une situation de blocage. C’est un mandat où on ne peut pas gouverner facilement, avancer sur les projets qui sont censés changer la vie des Français. C’est compliqué", soupire-t-il. Pour le consultant, visiter l'Élysée, symbole de la République a quelque chose de rassurant. "La République, c’est quelque chose qui est stable, peu importe les présidents et les gouvernements qui se succèdent, estime-t-il. Ça permet de rester concentré sur l’essentiel dans ce contexte politique un peu tendu".

Une ambiance très feutrée règne dans les couloirs du palais, les visiteurs passent d'une salle à l'autre en chuchotant. "C’est doré, il y a beaucoup de choses, c’est vraiment très impressionnant", commente l’un d’eux à boix basse, particulièrement ébahi par "la grandeur, les plafonds, les lustres, le mobilier, l’histoire qui vient avec les différents bureaux".  Il n’y a pas de guide pour assurer la visite mais des pancartes explicatives que Caroline lit avec attention : "Ici, le Salon des Fougères. C’est le bureau de Madame Macron". Elle remarque "les petits fauteuils" qu’elle trouve "assez cosy tout en étant assez discrets, à l’image de Madame Macron".

Caroline, visiteuse d'un jour au palais de l'Elysée, devant le bureau de Brigitte Macron le 21 septembre 2024 (SANDRINE ETOA-ANDEGUE / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

"J’essaie d’apprécier la visite"

Jean de son côté, n’est pas impressionné mais plutôt préoccupé par le sort du nouveau gouvernement Barnier. "Je ne vois pas qui peut se projeter. On cherche un équilibre et de ce fait, je suis assez pessimiste quant au choix des options, quelles qu’elles soient, qui pourraient être prises pour la France. Et d’ailleurs, ce qui est un peu surprenant, c’est un euphémisme, souligne-t-il, c’est que, pour le moment, on s’intéresse plus au choix des noms qu’à la définition de la politique".

Malgré l'instabilité politique née de la dissolution, Isidore, un jeune pharmacien, veut y croire. "Je pense qu’il peut s’en sortir, qu’il faut laisser le temps et voir ce que ça donne. Et le président décidera dans un an s’il re-dissout ou s’il ne re-dissout pas". 

Tout ça semble loin pour Lenaig et sa grand-mère Danielle, venues exprès de Bretagne, pour admirer les ors du palais présidentiel. "Aujourd’hui, on oublie un peu la situation politique. On se remettra dans la vie réelle demain", tranche l‘aînée. "C’est exactement ce que je me suis dis, appuie sa petite-fille. Je me fais une parenthèse, j’admire et j’essaie d’apprécier la visite". Elle conclut : "Pour l'instant, on profite."

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