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Comment l'Allemagne, le Royaume-Uni et le Kenya font face à une inflation record ?

Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, direction l'Allemagne, le Royaume-Uni et le Kenya où l'inflation bat des records.

Article rédigé par franceinfo - Ludovic Piedtenu, Emeline Vin et Charlotte Simonart
Radio France
Publié
Temps de lecture : 7min
Dans un supermarché à Dusseldorf en Allemagne, le 29 avril 2022. (INA FASSBENDER / AFP)

L'inflation ne s'arrête pas aux frontières françaises. La pandémie de Covid-19 et le deux mois de guerre en Ukraine tirent à la hausse les prix dans de nombreux pays. Direction l'Allemagne, le Royaume-Uni et le Kenya.

En Allemagne, l’inflation s’établit à un niveau record

Selon les chiffres du mois d’avril, l'inflation est de 7,4% sur un an en Allemagne. L'inquiétude monte sur la question du pouvoir d'achat dans le pays. Avec une flambée semblable à la moyenne des 19 pays de la zone euro (+7,5%), l’inflation en Allemagne se situe donc aussi à ce niveau inédit depuis la création de la monnaie unique et de la même intensité qu’à l'automne 1981 avec la première guerre du Golfe, le conflit qui oppose l’Iran et l’Irak. Quarante ans plus tard, c’est encore une guerre après une pandémie qui additionnées provoquent d’abord ces pénuries, une machine industrielle à la peine, puis cette panique sur les marchés des matières premières avec comme première conséquence, et cela a été très mal vécu ici cet hiver quand cette spirale inflationniste touchait déjà les Allemands, le renchérissement de leur facture énergétique. Dans un pays qui paie déjà l’électricité parmi la plus chère d’Europe. L'augmentation de 35% sur un an a pu être très violente pour des milliers de familles, idem ensuite pour les carburants. L’Allemagne, contrairement à la France avec ses remises à la pompe, a préféré verser des subventions aux ménages.

Le gouvernement considère que cette solution mise en place à la fin mars a provoqué les effets positifs attendus. Une satisfaction exprimée mardi 3 mai par le ministre des Finances, le libéral Christian Lindner : "Avec notre intervention, nous avons compensé 90% de la charge supplémentaire qui pèse sur les citoyens en raison de la hausse des prix de l’énergie et des prix à la consommation." Pour aider à boucler les fins de mois, chaque salarié imposable a donc reçu 300 euros. Les ménages les plus pauvres ont reçu 100 euros supplémentaires et autant d’argent par enfant. Soit 600 euros pour une famille en difficulté avec deux enfants à charge, en complément bien entendu des habituelles allocations familiales. Au-delà de cette mesure, le gouvernement a également annoncé une forte réduction des prix des transports publics ainsi que la baisse de la taxe énergétique au niveau minimum européen sur les carburants pendant trois mois, soit un gain pour les automobilistes de 30 centimes par litre pour l'essence et de 14 centimes pour le diesel.

Le Royaume-Uni subit une inflation inédite depuis 30 ans

Le coût de la vie fait partie des principales préoccupations des Britanniques, qui vont voter jeudi 5 mai pour des élections locales. Le gouvernement est accusé de ne pas en faire assez pour aider les ménages. Lors d’une interview mardi Boris Johnson a admis que le gouvernement pouvait en faire davantage avec par exemple, une taxe exceptionnelle sur les compagnies d’énergie ou le report de certaines augmentations d’impôts, mais que la stratégie visait le moyen voire le long terme. Alors que la crise du "coût de la vie" touche déjà très concrètement des milliers de personnes : 40% des Britanniques pourraient se retrouver en situation de pauvreté énergétique cet automne, les banques alimentaires sont dépassées par une demande inédite.
Non seulement accusé d’inaction, le gouvernement est même jugé déconnecté de la réalité. Rien que mercredi, un ministre a conseillé aux ménages qui ont du mal à joindre les deux bouts de mieux choisir dans les supermarchés, par exemple en se rabattant sur la marque distributeur. Dans l’interview diffusée mardi sur ITV, la journaliste Susanna Reid évoque le cas d’Elsie, retraitée de 77 ans qui ne mange plus qu’un repas par jour et qui, pour économiser le chauffage, passe la journée dans un bus grâce à sa carte de transport pour senior… Réponse de l’ancien maire de Londres : "Je ne veux pas qu’Elsie renonce… On va parler d’Elsie dans un instant et de ce que nous faisons, mais laissez-moi vous rappeler que c’est moi qui ai introduit la [gratuité des transports pour les seniors !] " Le Premier ministre, en réponse à une autre question, a déclaré je cite qu’ "on ne peut aider tout le monde".

Au Kenya, l'inflation atteint des sommets

La première économie d’Afrique de l’Est est aussi touchée par la flambée des cours mondiaux. L’inflation atteint 6,47% au mois d’avril et la situation est de plus en plus dure pour les Kenyans. Il y a beaucoup de désespoir au sein de la population. Tous les produits sont concernés. Il y a l’alimentation avec parfois des prix qui ont plus que doublé. C’est le cas de l’huile de cuisson et de la farine par exemple. Les fruits et légumes produits localement sont aussi affectés car leurs cultures dépendent de l’engrais russe. Un nouveau coup dur alors que la population se remet à peine de la crise économique liée à l'épidémie de Covid-19 ayant mis au chômage des milliers de kenyans. Sans parler de la sécheresse qui sévit dans le nord du pays, autre facteur de la flambée des prix au Kenya.

Face à cette situation, le président a annoncé une augmentation de 12% du salaire minimum. Salaire qui n’avait pas été revalorisé depuis trois ans. Des mesures fiscales ont aussi été prises, applaudies par le Fonds monétaire international. Elles devraient réduire la vulnérabilité de l’économie du pays. Mais en réalité, le Kenya n’a que peu de marge de manœuvre tant sa dette s’alourdit. Aujourd’hui, pour chaque shilling récolté, plus de 60 centimes partent dans les intérêts de la dette publique. Tout cela arrive en pleine campagne électorale. La présidentielle est attendue en août prochain pour un changement de régime car le président sortant, Uhuru Kenyatta, ne peut pas briguer un 3e mandat consécutif. Un scrutin qui s’annonce sous haute tension dans ce contexte. Le pouvoir d’achat est aussi au Kenya au cœur des débats.

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