La Pologne et le Royaume-Uni repoussent les demandes de livraison d'avions de combat à l'Ukraine pour le moment
Tous les jours, le club des correspondants décrit comment un même fait d'actualité s'illustre dans deux pays.
Après les chars modernes, l'Ukraine réclame des avions de combat pour repousser les forces russes. Mais pour l'instant les pays de l'Otan sont plutôt réticents à fournir ce genre d'armes à Kiev, à moins que la Pologne ou le Royaume-Uni n'ouvrent une brèche.
Pour l'instant le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki n'a pas l'air fermé à l'idée d'envoyer des avions F-16 en Ukraine. Il a affirmé que "la Pologne envisage toutes les mesures nécessaires pour renforcer les défenses ukrainiennes", ce qui inclut donc ces avions de chasse.
Du côté de Kiev, on assure que la Pologne envoie des signaux positifs quant à la livraison de ces avions. Mais en interne, on reste prudent. Le gouvernement polonais n'envisage pas de piocher dans le stock des 48 F-16 de l'armée. Le vice-ministre de la Défense nationale a d'ailleurs tempéré les propos de Mateusz Morawiecki : à l'heure actuelle Varsovie ne prévoit pas de transférer de F-16 de l'autre côté de la frontière.
Un moyen de pression pour les pays indécis
Varsovie est l'un des alliés les plus impliqués dans l'aide militaire à l'Ukraine depuis le début de la guerre. On a pu le voir ces dernières semaines avec la livraison des chars Léopard. La Pologne s'est démenée pour faire plier le chancelier allemand et autoriser les exportations. Ce qu'elle juge avoir réussi en montant une coalition de pays qui voulaient envoyer des chars Léopard en Ukraine.
La Pologne envisageait même de les livrer sans le feu vert de Berlin. De quoi prouver à Kiev sa grande loyauté. C'est donc dans cette logique que l'Ukraine mise sur son voisin pour peser dans les décisions de l'Otan, et faire pression sur les plus indécis. Mais cette fois, cela s'annonce plus compliqué. La Pologne n'a pas le soutien des États-Unis. Joe Biden a dit non à la livraison de chasseurs F-16 à l'Ukraine.
De plus, la Pologne n'a pour l'instant pas intérêt à fournir ses avions F-16. C'est le sentiment de beaucoup d’experts militaires. Ces avions sont très utiles à la Pologne. Ils lui permettent de maîtriser son espace aérien. Alors, beaucoup redoutent de voir partir des avions sur le terrain de guerre ce qui affaiblirait les défenses aériennes polonaises.
Le cas des avions de chasse est différent de celui des chars Léopard. Si la Pologne a pu faire pression et rapidement proposer son matériel à l'Ukraine, c'est qu'elle avait déjà prévu de le remplacer. Varsovie a acheté du matériel américain et sud-coréen pour moderniser son armée et pouvait se séparer de l'ancien. Mais pour l'instant aucun contrat n'a été signé pour remplacer les F-16 polonais. En Pologne, on s'attend donc à ce que ce soit un pays mieux préparé qui prenne les devants. Les États-Unis par exemple, qui ont déjà modernisé leur armée.
Envoi en suspend au Royaume-Uni
Downing Street s'aligne sur la position des États-Unis et résiste pour l'instant aux demandes ukrainiennes. Avec cet argument : il est compliqué d'envoyer des avions de chasse britanniques en Ukraine en raison de leur sophistication. Il faudrait compter au moins 35 mois pour former un pilote ukrainien à les utiliser.
Le ministre de la Défense, Ben Wallace, a toutefois précisé mercredi 2 février que le Royaume-Uni n'avait pas pris de décision ferme. Il estime que pour le moment, l'envoi de ces avions n’est pas opportun. Le ministre n'exclut rien.
D'autant que la position du gouvernement ne fait pas l'unanimité. L'ancien Premier ministre Boris Johnson appelle de son côté le Royaume-Uni à envoyer ses avions. Il a fait une intervention remarquée depuis Washington, exhortant les pays occidentaux à "donner aux Ukrainiens les outils pour finir le job". Il estime que les pilotes ukrainiens sauront utiliser des avions de chasse, et ne croit pas à une réponse nucléaire de Vladimir Poutine."Il n'utilisera pas d'armes nucléaires, estime Boris Johnson, car cela éteindrait instantanément la dernière lueur de soutien de la Chine et lui ferait perdre tous les électeurs du monde, de l'Inde à l'Afrique en passant par l'Amérique latine."
"Mettons fin au mesurage du soutien à la pipette et donnons aux Ukrainiens le soutien dont ils ont besoin pour terminer cette guerre de la seule manière dont elle peut et doit être terminée, et donnons-leur ces outils maintenant. "
Boris Johnson, ancien Premier ministre du Royaume-Uni
La sortie médiatique de Boris Johnson ne semble pas être du goût de son rival Rishi Sunak. Ce dernier serait selon son porte-parole "satisfait" de voir l'ancien Premier ministre maintenir son appui fidèle à l'Ukraine, mais Boris Johnson ne s'exprime pas au nom du gouvernement.
Il faut dire que depuis le début de la guerre, le Royaume-Uni soutient totalement l'Ukraine militairement. Emmené par Boris Johnson, le Royaume-Uni a été le premier pays européen à fournir des armes défensives à Kiev début 2022, notamment des missiles antichars. Au total, le pays a apporté 2,3 milliards de livres sterling d'aide militaire à l'Ukraine l’année dernière – plus que tout autre pays à l'exception des États-Unis. Le gouvernement de Rishi Sunak s'est engagé à maintenir le même niveau de financement en 2023, à commencer par l'envoi de 14 chars lourds.
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